Chère lectrice, Cher lecteur,
Pour le défi littéraire Madame lit des livres du monde, en août, la littérature allemande était à l’honneur. À cet égard, j’ai décidé de plonger dans l’univers de l’un de mes écrivains allemands préférés. J’ai eu l’immense plaisir de lire Le jeu des perles de verre de Hermann Hesse. Ce roman a permis en grande partie à l’auteur de remporter en 1946 le prix Nobel de littérature. Il y a quelques années, j’avais lu Narcisse et Goldmund et Le loup des steppes de Hesse. Ces lectures font partie de celles dont je garde un excellent souvenir car les personnages sont des êtres marqués par une profondeur et un sens de l’observation critique très développé. Dans Le jeu des perles de verre, le lecteur a accès à la biographie fictive de Joseph Valet. Cette dernière a été écrite peu de temps après la mort de Valet. Ainsi, le lecteur est amené à suivre le chemin de vie détaillé de cet homme en ayant accès à son parcours en tant qu’étudiant, puis en tant que Maître (le poste le plus prestigieux de Castalie) du Jeu des perles de verre (sommet de l’abstraction ludique). Le récit se déroule principalement à Castalie, province imaginaire, lieu de prédilection de la culture et de l’ordre.
Ce livre trônait depuis très longtemps dans ma bibliothèque et le défi m’a permis de le sortir et de m’y immerger totalement. Pour moi, l’intérêt de ce bouquin repose, entre autres, sur l’évolution de Valet. Il décide de quitter Castalie dont il est le magister ludi (l’homme le plus important car il est responsable du jeu intellectuel qualifié de sommet de toute la vie spirituelle) pour vivre. Il rompt avec l’ordre établi pour aller à la rencontre de la liberté et de lui-même. Ses valeurs divergent du monde de Castalie qui apparaît comme un endroit fermé, une sorte de paradis isolé réservé aux intellectuels et coupé totalement des autres, du peuple. C’est l’endroit où la connaissance absolue apparaît comme la valeur la plus importante. Valet sent que le monde de Castalie connaîtra inévitablement sa fin et que ce dernier est sur le point d’entamer son déclin. À cet égard, Valet puisqu’il est conscient de la chute de l’ordre, décide de donner sa démission en tant que directeur et de quitter sa tour d’ivoire pour amorcer une quête de lui-même et de se réaliser dans la vita activa. Ainsi, en accédant à son moi, Valet remonte à la source même de sa vérité en tant qu’être humain. Le narrateur fait remarquer à propos de Valet qui est en marche vers sa liberté intérieure et la vie :
Il y avait longtemps que le jour et le monde n’avaient plus revêtu pour lui cet aspect, qu’ils n’avaient plus eu cette légèreté, cette beauté, cette innocence. Le bonheur d’être libre, de décider de lui-même, le pénétrait comme une boisson capiteuse. Depuis combien de temps n’avait-il plus éprouvé cette sensation, la grâce et le ravissement de cette illusion? […] Il se savait en sécurité, libre de tout engagement, il se savait pour un instant parfaitement disponible, dégagé du circuit, délivré de toute obligation de travail, de pensée, et ce jour lumineux, coloré, l’environnait de son doux rayonnement; il n’était qu’image, que présence, sans exigence, sans hier et sans lendemain. (p. 407-408).
Donc, entrer dans cet univers profond, beau comme une perle, c’est suivre la pensée d’un héros fascinant dans toute sa complexité d’artiste, d’intellectuel, de pédagogue, d’homme.
Voici une vidéo où l’on présente un extrait tiré du roman expliquant la chute fatale de Castalie.
Je suis vraiment heureuse d’avoir pris le temps de savourer chacune des phrases de ce récit. Il y a des livres comme ça, dont l’histoire nous transporte ailleurs, plus loin que soi et nous savons que c’est ça, la beauté, la vérité, le yin et le yang… Hesse est un grand écrivain et le lire, c’est s’ouvrir à une dimension où l’homme décide de vivre avec la société et non pas de s’en séparer.
Je vous laisse sur ce poème de Valet que j’ai trouvé magnifique car il résume en quelque sorte sa vie.
DEGRÉS
Fleurette passe et l’âge dépasse
la jeunesse : il est ainsi des fleurs
à chaque pas de la vie, de la sagesse, de la vertu;
chacune a sa saison, nulle l’éternité.
Cœur, quand la vie t’appelle,
sois paré à partir et à recommencer,
cours, vaillant, sans regret,
te plier à des jougs nouveaux et différents.Et tout commencement un charme a sa demeure,
C’est lui qui nous protège et qui nous aide à vivre.Franchissons donc, sereins, espace après espace;
n’acceptons en aucun les liens d’une patrie,
pour nous l’esprit du monde n’a ni chaînes, ni murs;
par degrés il veut nous hausser, nous grandir.
A peine acclimatés en un cercle de vie,
intimes en son logis, la torpeur nous menace.
Seul, prêt à lever l’ancre et à gagner le large,
tu pourras t’arracher aux glus des habitudes.Peut-être aussi l’heure de la mort nous lancera-t-elle,
jeunes, vers de nouveaux espaces.
L’appel de la vie jamais ne prendra fin…
Allons, mon cœur, dis adieu et guéris.
Avez-vous déjà lu un roman de Hermann Hesse? Lequel?
Bien à vous,
Madame lit
HESSE, Hermann, Le jeu des perles de verre, traduit de l’allemand par Jacques Martin, Paris, Calmann-Lévy, 1983, 545 p.
ISBN 2-7021-0045-7
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Un auteur que je n’ai jamais lu ….il m’intimide beaucoup …
Je note ce titre
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Je te conseille de débuter par Narcisse et Goldmund. C’est une belle façon d’entrer en contact avec son univers et c’est peut-être une lecture moins intimidante.
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C’est un livre profond, intriguant qu’il faut lire en prenant des notes, qu’il faut relire pour savourer de nombreux passages qui incitent à la réflexion…
Et que dire de ta trouvaille… Cet univers profond, beau comme une perle…
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Merci! J’espère que de ton côté, tu as découvert aussi de magnifiques perles durant ce mois allemand. Au plaisir!
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D’Hermann Hesse, je n’ai lu que « Le loup des steppes » et j’ai beaucoup aimé…
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J’espère que tu vas pouvoir un jour poursuivre ta découverte des autres bouquins de ce grand auteur. Merci!
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Je suivrai plutôt ton conseil à Valentyne… quand les romans québécois de la rentrée auront étanchés ma soif de lecture.
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D’accord… c’est vrai que la rentrée québécoise s’avère très prometteuse!
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Je n’ai lu que Siddhartha d’Hermann Hesse, que j’ai adoré et conseille vivement.
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Ce sera ma prochaine lecture de cet écrivain alors (pas tout de suite) mais dans un futur proche!
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Bien d’accord avec le conseil donné à Valentyne, Le jeu des perles de verre est le roman le plus difficile de l’auteur, j’en avais d’ailleurs abandonné la lecture, ce qui est rare chez moi. Peut-être réessaierai-je un jour.
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Oui! Il ne faut pas débuter par ce dernier. Mais c’est un excellent livre, difficile mais intéressant.
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Dans un passé assez lointain il me semble j’ai lu Siddhartha d’Hermann Hesse, mais cela redonne envie de se replonger dans son univers
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Merci! Je suis contente de le savoir et de t’avoir donné le goût de découvrir un autre univers de Hesse. Au plaisir!
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Merci pour l’abonnement à mon blog- à bientôt 🙂 amitiés
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Au plaisir! 🙂
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