
« […]» mais que ni elle – non – ni le monde entier ne l’empêcherait jamais, lui, de l’aimer. (p. 329)
Chère lectrice, Cher lecteur,
Pour le mois, en guise de classique pour le Défi 2019 de Madame lit, j’ai choisi de lire Nord et Sud d’Elizabeth Gaskell. Je voulais plonger dans cette histoire car il me tardait de découvrir la plume de cette grande dame de la littérature britannique qui a fait paraître Nord et Sud en roman- feuilleton en 1854-1855 dans la revue Household Words de Charles Dickens. Ce roman a aussi été publié en 1855 chez Chapman & Hall. J’aime beaucoup les romans de l’époque victorienne et je souhaite approfondir ma culture littéraire de cette dernière.
Résumé
Miss Margaret Hale, après le mariage de sa cousine avec qui elle a grandi à Londres, retourne vivre auprès de ses parents à Helstone, un village du Sud de l’Angleterre. Peu après son arrivée, son père, un pasteur, renonce à exercer sa profession par droiture. Sa franchise intellectuelle par rapport au rôle de l’église l’amène à abandonner presbytère et paroisse pour devenir un professeur privé, suite aux conseils de son ami Mr Bell, dans une ville industrielle du Nord, Milton. Margaret et sa mère le suivent.
La famille prend conscience de la réalité des habitants de Milton qui sont pour la plupart des ouvriers. Margaret rencontre Mr John Thornton, l’élève préféré de son père, qui est propriétaire d’une usine de textile. La jeune femme le trouve prétentieux, insensible, dur par rapport à sa gestion et à ses idées. Il représente le patronat et la modernité. De son côté, Thornton pense que la jeune femme est orgueilleuse, hautaine et prétentieuse. Margaret apparaît plutôt associée à la bourgeoisie et aux traditions. Malgré tout, il tombe amoureux d’elle en raison de sa beauté et de ses convictions et il la demande en mariage. Margaret refuse car elle ne comprend par cet homme.
Margaret apprend progressivement à aimer les habitants de Milton. Elle noue une relation d’amitié avec la famille de Nicolas Higgins, un ouvrier qui lui parle de syndicat et elle réalise les dommages causés par la poussière industrielle. Ses relations avec Thornton sont tendues et elle occupe ses journées à prendre soins de sa mère malade et de la famille Higgins. Sa mère avant de mourir demande à revoir son fils Frédéric. Ce dernier ne peut fouler le sol britannique car il est recherché par les autorités à la suite d’un malentendu. Margaret et son père décident de le faire venir en cachette. Au moment où Frédéric regagne la gare pour retourner en Espagne où il vit en exil, un drame se produit ajoutant à la liste de malentendus animant la relation entre Margaret et Thornton. Ce dernier en vient à penser que l’élue de son cœur s’avère malhonnête.
Puis, c’est son père qui décède auprès de son vieil ami Mr Bell. Orpheline, Margaret retourne vivre auprès de sa cousine et de sa tante à Londres. Une suite d’incidents provoque la chute de l’entreprise de Mr Thornton. Margaret hérite d’une fortune au décès de Mr Bell et elle décide d’aider Mr Thornton dans ses projets car elle réalise qu’elle lui doit la vérité et qu’elle a des sentiments pour lui.
Au fil de la lecture, John Thornton s’humanise puisqu’il souhaite se rapprocher de ses ouvriers et comprendre leur réalité. Margaret, de son côté, prend son destin en main lorsqu’elle atteint la majorité et elle s’ouvre à une nouvelle réalité avec l’ère industrielle.
Miss Margaret Hale et Mr John Thornton
Ce couple est au centre de cette histoire. Il m’a beaucoup fait penser à Elizabeth Bennet et Darcy d’Orgueil et préjugés de Jane Austen en raison de l’orgueil, des préjugés et des malentendus animant la relation des deux couples. J’ai beaucoup apprécié suivre l’évolution des sentiments de Margaret et de John à travers leurs épreuves respectives. Ils sont imparfaits et ils le réalisent, mais ils veulent le bien de l’un et de l’autre.
Comme le constate Thornton :
Toute cette joie de vivre, toute l’honnête fierté que me donne mon travail, ce sentiment aigu et profond d’exister, c’est à elle que je les dois! […] – à une personne que j’aime comme aucun homme, je crois, n’a jamais aimé une femme. (p. 306)
Ou encore :
Il lui rendait cette justice, alors qu’il eût été plus facile pour lui de la croire totalement indigne de son estime. C’était la cause de son tourment, cet amour passionné qu’il lui portait, cette conviction qu’il avait que, malgré tous ses défauts, elle était plus charmante que toutes les autres et supérieures à elles. (p. 481)
Il y a une belle histoire d’amour entre ces deux protagonistes. J’aurais aimé qu’elle soit plus traitée. L’autrice a préféré mettre l’accent sur la distinction entre le Nord et le Sud et les modes de vie opposés et sur l’arrivée du syndicat dans les industries. C’est bien aussi. Cela permet de dresser un certain portrait de personnages en fonction de leur position afin d’aborder les rapports sociaux de l’époque.
Opposition en le Nord et le Sud
Un autre attrait de ce roman, c’est la façon dont le Nord est associé à l’enfer et le Sud au paradis. Les descriptions de la nature sont en ce sens merveilleuses. Margaret parle à Bessy de Helstone en ces termes :
Oh, Bessy, si vous saviez combien je l’aimais, ce village que nous avons quitté! Si seulement vous pouviez le voir! Il est beaucoup plus beau que les descriptions que je peux vous en faire. Imaginez tout autour de grands arbres dont les longues branches se déploient à l’horizontale, et donnent une ombre propice au repos, même à midi. Et bien que chaque feuille semble immobile, on entend un bruissement continuel partout alentour, comme un mouvement diffus. À certains endroits, l’herbe est aussi fine et délicate que du velours; à d’autres, elle est luxuriante à cause de l’humidité perpétuelle quand elle ouvre se trouve à proximité d’un petit ruisseau caché qui coule dans un murmure argentin. Ailleurs, des fougères ondulent à perte de vue : certaines tapies dans l’ombre verte, d’autres striées de la lumière du soleil. On dirait la mer. (p. 161)
Margaret reste fortement attachée à Helstone et elle l’idéalise.
Les citadins sont décrits comme des gens nerveux, actifs, cloîtrés tandis que les campagnards sont présentés comme des esprits sains, libres et solitaires.
Toutefois, au fur et à mesure que l’on avance dans le récit, le lecteur suit le changement de perception de Margaret par rapport au Nord. Si bien qu’à la fin, Margaret lors d’un voyage à Helstone, ne retrouve plus la magie d’antan.
Une bien belle lecture pour moi. Je la recommande pour ceux et celles, qui comme moi, veulent un peu plus découvrir la littérature victorienne. Margaret et John m’apparaissent comme de beaux personnages. C’est une histoire facile à lire et Elizabeth Gaskell s’avère une grande écrivaine. Elle a su présenter un personnage féminin fort, rempli de belles convictions.

Pour lire d’autres chroniques sur ce récit, vous pouvez consulter ces billets :
Avez-vous lu ce livre? Aimez-vous tout comme moi la littérature victorienne?
Bien à vous,
Madame lit
GASKELL, Elizabeth . Nord et Sud, Paris, Fayard, collection Grands romans Points, 2010, 685 p.
ISBN 978-2-213-62730-4

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Bravo pour cette très belle et intéressante critique…
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Merci à toi Goran!
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Un livre que je veux lire depuis des années !
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J’espère que ma chronique va te donner le goût de plonger dans cet univers!
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J’aime beaucoup ton papier. Ce roman est intéressant mais moi aussi j’aurais apprécié qu’on incite encore plus sur cette relation entre les deux personnages principaux qui semblent tellement différents.
J’aime la littérature victorienne et continue à nous faire connaître de nouveaux titres.
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Merci beaucoup! Je vais tenter de présenter d’autres lectures de ce type tout aussi fascinantes. Au plaisir!
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J’aime beaucoup cette autrice, elle élabore une critique patiente, parfois un peu masquée, comme il était convenable pour une dame, mais on sent toujours son esprit incisif et son regard clair.
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Oui. On sent l’intelligence du regard sur l’époque. Une grande écrivaine avec un esprit comme tu l’as mentionné incisif et analytique.
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