
Chère lectrice, Cher lecteur,
En août, pour le Défi littéraire 2019 de Madame lit, j’ai décidé de lire deux classiques (Nord et Sud d’Elizabeth Gaskell et Bonjour tristesse de Françoise Sagan). Voici ma chronique sur Bonjour tristesse (désolée de ne pas avoir pu la publier avant… je suis plongée en pleine rentrée scolaire avec mon retour en classe). Il est bon de rappeler que l’autrice a fait paraître ce roman alors qu’elle était âgée seulement de 18 ans. Véritable phénomène littéraire de son époque, il me tardait de découvrir ce livre qui a propulsé Sagan au sommet. Il est à noter que le titre fait écho au poème d’Éluard tiré du recueil La vie immédiate.
Que raconte cette histoire?
La narratrice, Cécile, se souvient de cet été-là, celui de ses 17 ans. Elle accueille la tristesse en plongeant dans ses souvenirs.
Elle vit alors avec son père Raymond, un veuf d’une quarantaine d’années. Son père loue une villa pour l’été. Il est accompagné de sa jeune maîtresse de 27 ans, Elsa. Le trio compte bien profiter de la beauté de l’été au bord de la mer et de courir les événements mondains. Ils vivent de légèreté, de soleil, de plaisir. Toutefois, l’arrivée d’Anne, une belle amie de la mère défunte, vient bouleverser l’ordre établi. Anne est plutôt stricte, de bon goût et elle privilégie le savoir-vivre, l’intelligence.
Anne amène progressivement Cécile à reprendre les études pour réussir son baccalauréat et à accepter ses échecs scolaires l’empêchant ainsi de poursuivre son été sous le signe du plaisir, car l’adolescente entretient un amour de vacances avec Cyril, un jeune étudiant en droit. Mais encore, un triangle amoureux voit le jour entre Raymond, le séducteur, Elsa, la jeune maîtresse trop belle, et Anne, la femme mature, distinguée. Anne croit que Raymond est son véritable amour.
Lorsque Raymond et Anne annoncent qu’ils vont se marier, Cécile perçoit la fin de la relation père-fille axée sur l’oisiveté et la légèreté. Elle le prend mal et va tenter le tout pour le tout en créant un jeu axé sur la jalousie, le désir, la vengeance afin que le couple Anne-Raymond se sépare et ce, même si elle aime Anne et la respecte. Cécile manipule les règles selon son bon vouloir, mais elle ne sait pas que tout a un prix et que son immaturité engendrera des conséquences catastrophiques voire dramatiques.
Cruelle adolescence
Les personnages adolescents sont souvent présentés dans les romans comme cruels, insensibles, manipulateurs, oisifs. Nous pouvons penser aux Enfants terribles de Cocteau, à ceux des Chambres de bois d’Anne Hébert ou à ceux du Nez qui voque de Réjean Ducharme. Françoise Sagan n’échappe pas à la règle avec sa Cécile. Cette jeune fille de 17 ans m’apparaît assez terrible. Cécile décrit son été en toute légèreté presque avec désinvolture. Elle accueille la tristesse qu’elle présente dès le merveilleux incipit. Elle associe cette tristesse à la solitude, à un drame dont elle seule connaît le secret.
Sur ce sentiment inconnu dont l’ennui, la douceur m’obsèdent, j’hésite à apposer le nom, le bon nom grave de tristesse. C’est un sentiment si complet, si égoïste que j’en ai presque honte alors que la tristesse m’a toujours paru honorable. Je ne la connaissais pas, elle, mais l’ennui, le regret, plus rarement le remords. Aujourd’hui, quelque chose se replie sur moi comme une soie, énervante et douce, et me sépare des autres.
Cécile décrit deux mondes : celui de l’enfance rempli de jeux, d’oisiveté, de légèreté, de facilité, de distractions et celui des adultes marqué par les relations, l’argent, les responsabilité, les conventions sociales. Cécile et son père appartiennent à la première catégorie. Son père refuse de vieillir et il a choisi depuis qu’il est veuf une vie facile sous le signe des conquêtes amoureuses. Cécile vit en fusion avec lui. Elle lui voue un amour inconditionnel. Cécile et son père sont dans une recherche du plaisir immédiat. Leur bonheur en dépend. D’ailleurs, pour lui, il importe peu que Cécile obtienne son baccalauréat puisqu’il mentionne que sa fille trouvera bien des hommes pour la faire vivre.
Anne appartient à la deuxième catégorie. Elle représente la femme mature, intelligente, qui pose les lois. Cécile ne veut pas de ces lois, bien au contraire, elle les rejette de toutes ses forces d’adolescente. Comme lui fait remarquer Anne à propos de l’amour :
«Vous vous faites une idée de l’amour un peu simpliste. Ce n’est pas une suite de sensations indépendantes les unes des autres…»
Je pensais que toutes mes amours avaient été ainsi. Une émotion subite devant un visage, un geste, sous un baiser… Des instants épanouis, sans cohérence, c’était tout le souvenir que j’en avais.
«C’est autre chose, disait Anne. Il y a la tendresse constante, la douceur, le manque…Des choses que vous ne pouvez pas comprendre.» (p. 42-43)
Cécile ne peut comprendre le sentiment amoureux comme lui mentionne Anne. Elle est trop jeune, trop immature, trop légère. Pour elle, l’amour est associé au plaisir, à ce sentiment qu’elle ressent pour son père.
J’ai adoré cette histoire opposant deux mondes… d’une façon cruelle. L’adolescence s’avère la période idéale pour l’exprimer. Rejet des valeurs des adultes au profit d’une satisfaction du plaisir immédiat, elle n’est que pulsion et parfois, on lui dit : Bonjour Tristesse.
Alors, je vous recommande cette lecture. C’est puissant, c’est l’été, c’est la chaleur, c’est la Méditerranée, c’est la cruelle façon d’aimer d’une adolescente…
Pour vous mettre dans l’ambiance, voici la chanson titre du film Bonjour Tristesse (adaptation du roman de Sagan) interprétée par la grande Juliette Greco. Vous verrez une magnifique Jean Seberg.
Avez-vous déjà lu ce roman? L’avez-vous aimé?
Bien à vous,
Madame lit
SAGAN, Françoise. Bonjour tristesse, Paris, Julliard, coll. Le livre de poche, 1954, 180 p.

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Pour ma part je déteste Françoise Sagan. Je trouve son écriture sèche, aride. Ses personnages, malgré quelques remous psychologiques, me semblent creux. Et la vie quotidienne des gens ordinaires ne m’a jamais fait rêver en littérature…
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Merci beaucoup d’avoir partagé ton point de vue en répondant par le fait même à ma question. Je l’apprécie.
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J’avais beaucoup aimé ce roman…
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Alors, on est deux. 🙂 Merci!
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Un livre qui je pense me plairait beaucoup ! J’aime la thématique sur l’adolescence…
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Je pense que tu aimerais beaucoup ce roman.
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J’avais aimé ce roman malgré sa froideur et ton avis me donne envie de le relire. Merci pour cette fine analyse des personnages, c’est très intéressant !
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Merci à toi. J’espère que ta perception changera. Au plaisir!
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Je n’ai pas lu ce roman mais ton papier m’incite à m’y lancer. Le titre est tellement beau et la façon dont tu présentes le roman invite à la lecture.
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C’est vrai que le titre est beau… il est tributaire d’un poème d’Éluard qui est présenté en exergue. J’espère que tu auras la possibilité de le lire. Au plaisir!
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Oui mais il y a très longtemps. J’étais encore ado. Et du coup cette chronique me donne envie de le relire.
Merci.
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Je suis très heureuse de l´apprendre. Bonnes retrouvailles avec la plume de Sagan!
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