
«Le génie est une réponse à l’impossibilité de vivre, le bondissement du cerf au-dessus de la meute.» p.86
Chère lectrice, Cher lecteur,
En ces moments de confinement, je me suis laissée tenter par un livre de circonstance : La dame blanche de Christian Bobin puisque dans ce dernier, il est question d’Emily Dickinson. Pourquoi ce lien entre le confinement et la poétesse américaine? Tout simplement car cette dernière a vécu recluse dans sa chambre durant plusieurs années, ne parlant qu’à ses interlocuteurs derrière sa porte. Alors, je trouvais le moment intéressant, en étant confinée, d’aller à la rencontre de la grande dame de la poésie américaine grâce aux mots de Christian Bobin.
Mais encore, connaissez-vous la collection L’un et l’autre de Gallimard? Sur le site de la maison d’édition, on retrouve ceci pour la définir :
«Il n’y a aucune antinomie entre la littérature et la psychanalyse. Les romanciers sont simplement en avance sur les psychanalystes pour la compréhension des sentiments humains». Le psychanalyste J.-B. Pontalis, ancien collaborateur des Temps modernes, créateur de «Connaissance de l’inconscient» et de la Nouvelle Revue de psychanalyse (1970-1994), réunit dans cette collection des œuvres littéraires qui dévoilent «les vies des autres telles que la mémoire des uns les invente» : un dialogue, un va-et-vient entre l’auteur et son modèle, le propre de l’un se nourrissant de la fiction et de la quête de l’autre. Méditation sur des écrivains, artistes, personnages historiques, des villes, des lectures, rêveries biographiques, fragments d’érudition…
À cet égard, par le biais de cette collection, les écrivains peuvent partir en quête d’une figure les ayant marqués et ils plongent en eux pour aborder les états d’âme de cette dernière. Ainsi, Christian Bobin réinvente la vie d’Emily Dickinson par le biais de ses mots, de ses recherches, de sa perception de ce qu’aurait pu être son existence, ses relations. Le roman s’ouvre sur la mort d’Emily Dickinson, puis, il se poursuit par son enfance, son adolescence et sa vie d’adulte marquée par les décès de ses proches. Et bien sûr, il y a l’écriture, celle qui l’amène à puiser dans les profondeurs de son âme, à avoir une perception différente du réel, de l’amour, de la mort. L’écriture de Bobin va à l’essentiel pour respecter la poétesse. Elle est tantôt poétique, tantôt humble. L’écrivain ne cherche pas à présenter une biographie. Il tente plutôt de libérer une image l’habitant. Celle de la dame blanche se promenant dans les méandres de son âme.
Derrière la porte fermée à clé de sa chambre, Emily écrit des textes dont la grâce saccadée n’a d’égale que celle des proses cristallines de Rimbaud. Comme une couturière céleste, elle regroupe ses poèmes par paquets de vingt, puis elle les coud et les rassemble en cahiers qu’elle enterre dans un tiroir. «Disparaître est mieux». À la même époque où elle revêt sa robe blanche, Rimbaud, avec la négligence furieuse de la jeunesse, abandonne son livre féerique dans la cave d’un imprimeur et fuit vers l’Orient hébété. Sous le soleil clouté d’Arabie et dans la chambre interdite d’Amherst, les deux ascétiques amants de la beauté travaillent à se faire oublier. (p. 93)
La Emily Dickinson du roman de Bobin apparaît comme une figure mystérieuse, passionnante, lumineuse, aérienne. Elle semble entière, profonde, vraie. Elle n’était pas faite pour le noir, le morbide, le faux. Elle s’est créée un paradis, un monde à elle. Ses poèmes ont été sa lumière, son lieu, sa parole. Elle écrira :
A solemn thing – it was – I said –
A Woman – White – to be –
And wear – if God should count me fit –
Her blameless mystery –
Dans son roman, Bobin cite l’illustre poétesse que ce soit par des extraits de lettres ou de poèmes. Il a réussi à rendre un très bel hommage à la dame blanche. J’aurais aimé la connaître, échanger avec elle. Je comprends sa solitude, son dégoût des fausses amitiés, son désir d’éviter le superflu, sa profonde douleur causée par les deuils, les pertes. Là où elle repose, j’espère qu’il y a des boutons d’or pour illuminer ses jours et ses nuits.
«Bien avant d’être une manière d’écrire, la poésie est une façon d’orienter sa vie, de la tourner vers le soleil levant de l’invisible. (p. 55)»
Ce livre s’adresse aux amoureux des mots, de la poésie, du vrai et à ceux qui osent, parfois, affronter le néant.
Le néant et l’amour sont de la même race terrible. Notre âme est le lieu de leur empoignade indécise. p. 41
Avez-vous déjà lu un livre de cette collection? Connaissiez-vous cet hommage de Christian Bobin à Emily Dickinson?
Bien à vous,
Madame lit
BOBIN, Christian, La dame blanche, Paris, Gallimard, coll. L’un et l’autre, 2007, 119 p.
ISBN 978-2-07-078492-9

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Chritian Bonbin et Jean-Bertrand Pontalis sont des valeurs sûres pour ce qui est de tricoter les mots… Je ne connais pas cette collection mais ta belle chronique me donne bien envie de la découvrir. Bon dimanche !
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Merci beaucoup! J’espère que vous aurez du plaisir à la découvrir! Bon dimanche!
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Pardon pour Christian BOBIN 😁
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🙂
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Je ne connais pas cette collection de Gallimard mais j’aime beaucoup Christian Bobin, qui est un poète merveilleux … Vous m’avez convaincue de lire ce livre en tout cas 🙂
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Bien contente de l’apprendre alors. 🙂 Vous ne serez pas déçue. Au plaisir!
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Je ne savais pas du tout que ça parlait d’Emily Dickinson… pourtant! Je le lirai… j’ai tellement aimé le roman de Dominique Fortier à son sujet!
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Alors tu vas certainement l’aimer!!! Merci!
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Cela s’adresse donc à moi 🙂
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Contente de l’apprendre! 😉
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