
Chère lectrice, Cher lecteur,
En juillet, comme les prix Goncourt étaient à l’honneur, j’avais débuté Les Bienveillantes de Jonathan Littell, prix Goncourt 2006, mais mon ambition était trop grande et je n’ai pas réussi à le terminer à temps. Aussi, ce roman ne se lit pas en une journée. Après trente pages, je ne pouvais plus continuer. Ce livre s’avère difficile pour différentes raisons. Je vais tenter de m’expliquer.
Tout d’abord, il y a l’histoire. Cette lecture n’est pas une lecture légère. Elle est tout le contraire. Ainsi, il s’avère pénible de lire les horreurs commises par les nazis durant un été magnifique, car au Canada, nous avons une sublime température. Et oui, si vous ne le savez pas, ce roman présente les confidences d’un haut-gradé SS, Maximilien Aue, durant un sombre moment de notre Histoire. Ce dernier est un intellectuel, docteur en droit, amoureux de la musique de Rameau et Couperin, il est un admirateur, entre autres, de Stendhal. Très tôt, il joint le Parti national-socialiste. Ensuite, il devient un officier SS. Ce dernier, comme il le mentionne dès l’incipit, nous raconte sa vérité.
«Frères humains. Laissez-moi vous raconter comment ça s’est passé. On n’est pas votre frère, rétorquerez-vous, et on ne veut pas le savoir. Et c’est bien vrai qu’il s’agit d’une sombre histoire, mais édifiante aussi, un véritable conte moral, je vous l’assure. Ça risque d’être un peu long, après tout il s’est passé beaucoup de choses, mais si ça se trouve vous n’êtes pas trop pressés, avec un peu de chance vous avez le temps. Et puis ça vous concerne : vous verrez bien que ça vous concerne.»
Par ailleurs, nous suivons ses traces durant son parcours de SS exterminateur de Juifs sous l’Allemagne nazie. Le lecteur est plongé dans les atrocités des camps de concentration et est amené à côtoyer des montres nazis comme Himmler et Eichmann et même Hitler!
Ensuite, il y a le narrateur. Je n’ai pas réussi à m’attacher à lui. Je n’ai rien ressenti pour ce dernier durant les 900 pages de cette brique.
Alors pourquoi avoir persisté dans cette lecture? Même si cette histoire est terrible car le personnage principal apparaît comme un bourreau, un désaxé sexuel, un psychopathe, j’ai voulu tenter de comprendre les raisons motivant la folie des hommes ou des femmes durant cette période. J’ai désiré entendre une voix, pour me faire une idée sur les actes insensés des hommes et des femmes de cette période, pour essayer de percer l’innommable. Car des descriptions horribles se déroulant pendant plusieurs pages, il y en a. Je dois avouer que j’ai eu beaucoup de difficultés à poursuivre. J’ai voulu abandonner à plusieurs reprises, car je ne suis pas une grande lectrice de ce genre. Mais, il y a des lectures que je juge nécessaires et le roman de Jonathan Littell en fait partie. À la fin, lorsque j’ai lu la dernière ligne, j’étais fière de moi, contente d’avoir suivi les traces de Maximilien Aue, rêvant peut-être comme ses homologues, même s’ils sont dans l’erreur, d’un monde meilleur. L’écrivain a travaillé sans aucun doute très fort pour écrire ce livre. Ses descriptions sont crédibles, ses connaissances de cette période apparaissent immenses. Il fallait oser et il l’a fait. En ce sens, je lui lève mon chapeau.
De plus, son livre renvoie une pièce d’Eschyle.
Selon Wikipédia :
«Le titre Les Bienveillantes renvoie à une tragédie d’Eschyle, Les Euménides. Les Érinyes étaient des divinités vengeresses qui persécutaient les hommes coupables de crimes, en particulier d’homicides contre un membre de sa famille. Oreste, obéissant à l’oracle de Delphes lui demandant de venger son père Agamemnon, tue en effet sa mère Clytemnestre, et se voit poursuivi par les Érinyes ; mais la déesse Athéna plaide en sa faveur et les Érinyes se changent, pour Oreste, en Euménides, c’est-à-dire en Bienveillantes.»
Tout le livre se construit autour de ce mythe. Max est persécuté par deux policiers (figures des Érinyes) durant le livre, car il est soupçonné d’avoir tué son beau-père et sa mère. Par ailleurs, il a eu des relations incestueuses avec sa soeur, le grand amour de sa vie. Des enfants sont-ils nés de cette union ? Nous ne le savons pas.
Mais encore, la construction du roman est en 7 parties renvoyant à la musique. Selon encore une fois Wikipédia :
«Le récit est divisé en sept parties qui évoquent la musique et les danses du xviiie siècle (toccata, allemande I et II, courante, sarabande, menuet en rondeaux, air, gigue) et suivent la chronologie morbide de la guerre sur le front de l’Est, de la Shoah par balles en 1941 aux camps d’extermination des Juifs en passant par la bataille de Stalingrad pour s’achever à la chute de Berlin en 1945.»
Donc, je ne peux que vous encourager à lire ce récit malgré tout. Il faut parfois prendre des risques, sortir de sa zone de confort et c’est ce que j’ai fait. J’ai lu ce roman en un mois ayant comme personnage principal un anti-héros et il va rester longtemps dans ma mémoire.
L’avez-vous lu? Que pensez-vous de mon opinion?
Bien à vous,
Madame lit
LITTELL, Jonathan. Les Bienveillantes, Paris, Gallimard, 2006, 903 p.
ISBN 2-07-078097-X

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Je t’admire d’avoir persévéré dans la lecture de ce gros bouquin.
Je l’ai aussi dans ma bibliothèque et je ne l’ai jamais lu. De pleines pages de textes sans aucun paragraphe et des caractères passablement petits.
Je me suis souvenu de certaines images que j’avais vues à Auschwitz…
Je comprends ta motivation à poursuivre comme tu le soulignes et ton texte est un bon point de départ pour qui veut entreprendre la lecture de ce roman.
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Merci!!! J’espère que tu auras le courage de l’entreprendre. Il en vaut la peine.
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Je l’ai lu il y a une bonne dizaine d’années – j’étais encore au lycée donc c’est au moins ça.
Je l’avais bien aimé ce livre, mais il m’avait fallu persévérer : comme tu le dis, il n’est pas évident/courant d’avoir affaire à ce type de narrateur, et nous vivons souvent nos lectures sous le prisme de l’empathie. Je comprends donc ton parcours vis-à-vis de ce titre.
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Merci beaucoup… je crois que mon ressenti va être similaire aux autres lecteurs alors. Il est impossible de s’associer à un tel narrateur et de partager sa vision du monde. Mais cette lecture, même si elle fait mal, est nécessaire.
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Bonjour Nathalie,
J’ai essayé à deux reprises de lire ce livre, mais j’ai été incapable d’en poursuivre la lecture. Un de mes frères l’avait lu et m’avait prévenue que c’était une lecture ardue et difficile.
Bonne fin d’été et bonne rentrée scolaire.
Bon courage!
Fabienne
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Merci beaucoup Fabienne,
Oui, c’est une lecture très difficile. Si ce livre n’était pas fait pour toi, tu as bien fait de l’abandonner. Je dois avoir un petit côté «maso» pour avoir lu cette histoire pendant un été magnifique.
Au plaisir! Et bon courage à toi aussi!
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J’ai lu ce livre en 2016. Une folie qui mérite l’effort que la lecture de 900 pages réclame. Un puits de questions, un appel à une réflexion humble et courageuse. Je vais mettre la chronique, rédigée à l’époque, sur mon site. le partage de réactions face à un tel écrit ne pouvant nuire à l’avenir.
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C’est une excellente idée. Ce livre suscite évidemment de nombreuses questions et provoque une réflexion tout au fil des pages. L’humanité ne doit jamais oublier l’horreur qu’elle a créée.
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Je dois avouer que je ne me suis jamais penché sur ce roman, ce n’est que depuis que je bosse en librairie depuis quelques mois maintenant que je me rend compte qu’il y a un engouement autour de ce livre, j’ai très envie de le découvrir !
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Je l’avais dans ma bibliothèque depuis un certain temps et le défi me permet de lire enfin des romans que j´ai. C’est excellent mais difficile. L’homme dans sa monstruosité en temps de guerre devant un lecteur qui écoute sans comprendre…
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On a beaucoup parlé de ce roman, beaucoup de lecteurs le considèrent comme un vrai chef d’oeuvre. Pour ma part, je crains les descriptions des atrocités nazies, d’autant plus quand elles s’éternisent sur 900 pages … pas sûre de pouvoir supporter.
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Cœur sensible s’abstenir…, mais il y a évidemment autres choses et heureusement. Je ne suis pas certaine que j’aurais le courage de le recommencer. Merci!
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Jamais lu! Mais je souligne cette performance et d’écriture, et de lecture.
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Merci beaucoup! 🙂
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Tu as eu un dure livre durant ton été
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Oui mais je suis contente d’avoir pu le lire une fois dans ma vie. Merci!
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Bravo d’être allé jusqu’au bout. Je connais ce titre, mais je ne l’ai pas encore lu…
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Est-ce une lecture qui t’intéresse? Je crois que ce roman pourrait te plaire… L’article de François du blogue Je me livre est excellent pour traiter de ce roman.
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Oui, mais cette lecture ne sera pas pour bientôt…
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D’accord. C’est assez long aussi. Il faut avoir le temps de s’y consacrer et être disposé. J’ai trouvé cela difficile…
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Pas encore eu le courage de l’aborder. Il est chez mes parents, dans la chambre où je loge quand je vais chez eux, chaque été je le sors … et je ne le commence pas. Pour cet été c’est bien sûr raté aussi pour des raisons de pandémie puisque je ne suis pas allée en France évidemment. L’été prochain peut être.
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Je crois qu’il faut être disposée pour cette lecture. Et évidemment, ça prend du courage pour affronter cette période sombre de notre humanité. Merci!
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