«Étrange destin que celui de Patrick Brontë : fils d’un fermier illettré, il va donner la vie à trois des plus grandes plumes de la littérature anglaise. » (p. 13)
Chère lectrice, Cher lecteur,
J’ai décidé de lire Les Brontë par Jean-Pierre Ohl car je voulais participer d’une part au Printemps des Artistes organisé par la Bouche à Oreilles, et d’autre part, comme j’avais cette biographie dans ma bibliothèque depuis quelques mois, je me suis permis enfin de la lire. De plus, si vous ne le savez pas, je suis une grande admiratrice de la plume des Brontë. J’ai découvert tout d’abord Les Hauts de Hurlevent il y a une vingtaine d’années d’Emily, puis, j’ai lu Jane Eyre de Charlotte pour enfin découvrir le talent d’Anne avec La Dame du manoir de Wildfell Hall. Comme les soeurs Brontë continuent de faire couler de l’encre, j’ai eu le goût d’en apprendre davantage sur ces trois grandes dames de la littérature dont le talent était immense.
La biographie et ce que j’en pense
Comme je n’avais pas lu la biographie d’Elizabeth Gaskell sur Charlotte ni celle consacrée à Branwell par Daphnée du Maurier, je suis entrée dans Les Brontë en ne connaissant presque rien de leur vie si ce n’est qu’elles étaient mortes très jeunes (Emily meurt à trente ans, Anne à vingt-neuf et Charlotte à trente-neuf). Jean-Pierre Ohl, qui a déjà publié une biographie sur Dickens, présente une synthèse des ouvrages sur les écrivaines avec Les Brontë. Il puise également dans la correspondance de Charlotte avec ses deux grandes amies : Ellen Nussey et Mary Taylor pour dresser le portrait de cette famille mythique. Donc, c’est une biographie je dirais pour ceux et celles qui ne possèdent pas beaucoup de connaissances sur la famille du pasteur Patrick Brontë, car une biographie sur cette dernière composée de plusieurs enfants (Maria, Elizabeth, Branwell, Charlotte, Emily, Anne) dont les destins apparaissent tragiques rédigée en 250 pages, c’est peu. C’est pour cela que je parle d’une biographie synthèse.
La vie de Charlotte est assez bien détaillée car la biographie est rédigée principalement autour d’elle. Ainsi, j’ai appris que Charlotte avait refusé quatre demandes en mariage. Mais encore, cette dernière a travaillé très fort pour réussir à faire publier ses livres et ceux de ses soeurs.
J’aurais aimé en apprendre plus sur Emily dont les mots dans Les Hauts de Hurlevent sont magnifiques. Je n’ai qu’à penser à cette citation tirée de ce livre :
«Mon amour pour Linton est comme le feuillage dans les bois : le temps le transformera, je le sais bien, comme l’hiver transforme les arbres. Mon amour pour Heathcliff ressemble aux rochers immuables qui sont en dessous : source de peu de joie apparente, mais nécessité. Nelly, je suis Heathcliff ! Il est toujours, toujours dans mon esprit ; non comme un plaisir, pas plus que je ne suis toujours un plaisir pour moi-même, mais comme mon propre être. Ainsi, ne parlez plus de notre séparation ; elle est impossible […].»
Emily, mon écrivaine sauvage me semble bien mystérieuse même après la lecture de cette biographie. Je me demande encore comment des femmes si seules qui n’ont pas connu l’amour ont pu créer des personnages féminins et masculins si passionnés. Aux trois soeurs Brontë, j’associe le mot solitude. On dirait qu’elles ont vécu par procuration leurs émotions grâce à leur plume.
Par ailleurs, le lecteur reste aussi sur sa faim par rapport à Anne dont le livre La Dame du manoir de Wildfell Hall a été une lecture marquante et je me rappelle que j’avais trouvé l’écrivaine très audacieuse pour une fille de pasteur, car le personnage principal, Helen, quitte un mari violent, alcoolique, infidèle avec son fils et réussit à vivre libre à l’ère victorienne. Après la lecture de la biographie, on ne peut que faire des liens avec son frère Branwell, dont la vie de débauche a été maintes fois abordée.
Mais bon. Si vous êtes comme moi et que vous ne connaissez presque rien de la vie de cette famille, alors, cette petite biographie pourra certainement être une bonne introduction. Le biographe n’hésite pas à critiquer celle d’Elizabeth Gaskell sur Charlotte en mentionnant au lecteur que Gaskell a grandement contribué à créer une ambiance autour du mythe Brontë :
«Elizabeth Gaskell ne tarde guère à placer cette arrivée à Haworth sous le signe de la malédiction. Elle avait préparé le terrain en décrivant longuement l’arrivée au village, l’air « lourd et assombri par la fumée provenant des demeures et des usines », puis, « au fur et à mesure que la route monte la végétation [qui s’appauvrit] ne prospère plus et se contente d’exister » sous la forme de « pâles avoines verdâtres et faméliques », et enfin la maison qui jouxte un cimetière « terriblement encombré de pierres tombales ». La biographe se concentre sur les détails lugubres du décor, sur sa pente abrupte et comme infranchissable, sans accorder une épithète à la vie du village – cinq mille habitants tout de même à l’époque, « treize petites filatures […], un médecin, un marchand de vin, cinq bouchers, deux confiseurs, onze épiciers et trois ébénistes » -, le décrivant non comme ce qu’il était, un gros bourg en périphérie de la ville industrielle de Keighley, mais comme une sorte d’antichambre de l’enfer, située à l’extrême limite du monde civilisé, alors que Bradford, plus de cent mille habitants à l’époque, se trouve à peine à quinze kilomètres. Quant au dessin au crayon qu’elle réalise de l’église et du presbytère, avec les tombes au premier plan, il semble tout droit sorti d’un roman de Walpole ou de Mathurin !
C’est un paysage mental que dessine en fait Gaskell – une description stylisée, gothique,, romantique, mettant l’accent sur l’éloignement et la solitude du presbytère, qui va devenir « l’incontournable scène d’ouverture pour les biographies des Brontë ». À l’évidence, elle cherche à créer une atmosphère – n’oublions pas sa principale activité : écrire des romans… (p. 20-21)»
C’était ma participation au printemps des artistes organisé par La Bouche à oreilles avec Les Brontë. Je dédie cette chronique à Goran, mon ami blogueur, qui nous a quittés beaucoup trop tôt. De là-haut, j’espère qu’il va me donner la force et le courage de poursuivre sans lui dans la blogosphère. Merci Goran pour ta présence sur mon blogue depuis plus de cinq ans. Je vais m’ennuyer de toi, de tes mots, de ton humour. D’ailleurs, c’est lui qui a créé ce magnifique logo pour le Printemps des Artistes.
Bien à vous,
Madame lit
OHL, Jean-Pierre. Les Brontë, Paris, Folio, 2019, 307 p.
ISBN : 978-2-07-269397-7

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Touché par ta critique de cette biographie qui te laisse un peu sur ta faim, me semble-t-il. Touché aussi d’apprendre la disparition de Goran. Il est vrai que je n’ai pas été très présent ces derniers temps sur la Toile. Mais je suivais ses propositions et commentaires avec bonheur. Pour sûr, il va manquer!
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Merci beaucoup. Comme le livre ne compte que 250 pages pour une biographie sur toute cette famille, effectivement, je suis restée sur ma faim. Goran va nous manquer. Il est irremplaçable. Ses connaissances littéraires, cinématographiques, philosophiques sont gigantesques. Une grosse perte pour l’humanité.
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Ton texte est magnifique. C’est par toi que j’ai découvert ces écrivaines. Ce que je retiens surtout c’est cette dimension de la solitude chez ces écrivaines et ce qu’elles ont réussi à nous faire découvrir. Je me procure cette biographie mercredi et merci encore pour m’avoir fait aimer ces écrivaines et tout le plaisir qu’elles m’ont procuré à la lecture de leurs romans.
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Je suis contente de savoir que tu vas poursuivre ta découverte des Brontë par le biais de cette biographie. J’ai beaucoup aimé lire en même que toi le classique d’Anne Brontë. Au plaisir!
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Moi aussi j’ai beaucoup aimé Les hauts de Hurlevent, Jane Eyre… L’extrait me donne envie de les relire. Pour moi c’est une écriture apaisante, je dirais presque thérapeutique, une tisane 🙂
Est-ce qu’on en apprend beaucoup sur leur éducation, quand elles étaient enfants ?
Merci beaucoup pour ce partage.
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Par rapport à leur éducation, on comprend où Charlotte a puisé son inspiration pour Jane Eyre. J’ai bien aimé cette intrusion dans l’enfance et dans leur devenir.
J’aimerais aussi relire les Hauts de Hurlevent. J’ai tellement aimé les personnages et leur puissance.
Merci à toi!
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Merci pour cette belle chronique et pour cet hommage à Goran qui faisait partie de ma famille blogueuse. J’aimais beaucoup retrouver ses chroniques et échanger régulièrement des commentaires, suivre ses avis. Il va manquer, c’est sûr !
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Je ne sais pas si sa famille va laisser son blog ouvert… Goran va nous manquer profondément. Merci!
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Bonsoir Madame lit, merci beaucoup de cette participation à mon défi, cette biographie des soeurs Brontë a l’air tout à fait intéressante même si elle est visiblement trop courte par certains aspects.
Merci de cet hommage à Goran, je ressens aussi ce que vous exprimez, le besoin de chercher le courage de continuer sur la blogosphère sans sa présence. Amicalement.
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Je lis peu de biographies mais c’est en me plongeant dans des ouvrages sur Zola qui j’ai commencé à changer d’avis.
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Parfois, on change d’idées! J’aime bien en lire car les biographes travaillent tellement fort pour retracer les faits. Merci!
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