«Alors, elle s’aperçut qu’elle n’avait plus rien à faire, plus rien à faire». (p. 119)
Chère lectrice, Cher lecteur,
J’ai décidé de lire Une vie de Maupassant car j’ai appris qu’Annie Ernaux adorait cette histoire. Comme elle le mentionne dans une entrevue pour Bibliobs à propos de l’impact que le roman a eu dans son existence:
«Une vie » a donné un sens concret, urgent, à la nécessité d’avoir un métier et d’être indépendante. Et en même temps, cet usage libérateur du livre n’a été possible que grâce à l’empathie ressentie avec le personnage de Jeanne, sa sensualité et sa peur du sexe, sa sensibilité à la nature, sa mélancolie du temps qui fuit, son ennui, ses illusions mêmes. C’est parce qu’elle est moi que je ne veux pas être elle, d’une certaine façon! »
Et plus loin, elle dit qu’Une vie est :
«Un roman magnifique, d’une lucidité noire et d’une profonde compassion pour la condition humaine.»
Il n’en fallait pas plus pour que ma curiosité soit piquée et que je lise enfin un bouquin de cet écrivain français.
Que raconte Une vie?
Jeanne Le Perthuis des Vauds sort du couvent à dix-sept ans pour retourner au château Les Peuples auprès de ses parents. Elle est l’enfant unique d’Adélaïde et du baron Simon-Jacques Le Perthuis des Vauds. Elle rêve du prince charmant et elle l’attend pour faire un beau mariage. Elle tombe sous le charme du vicomte Julien de Lamare et elle l’épouse après quelques mois de fréquentation. Elle apprend rapidement ce que représente le mariage auprès d’un mari volage. Elle tombe enceinte et elle accouche d’un fils qui deviendra l’amour de sa vie.
Ce que j’ai pensé de ma lecture
Je n’ai pas tout raconté dans mon résumé car je voulais garder un brin de mystère par rapport à l’intrigue, mais je dois avouer que j’ai adoré, mais adoré ma lecture. Je me suis profondément attachée au personnage de Jeanne, à ses états d’âme, à sa sensibilité extrême, à ses illusions déchues. Elle pleure énormément durant l’histoire car elle est naïve et elle s’apitoie sur son destin et avec raison. D’ailleurs, la symbolique de l’eau s’avère particulièrement intéressante dans le récit. Par exemple, l’incipit la dévoile :
«Jeanne, ayant fini ses malles, s’approcha de la fenêtre, mais la pluie ne cessait pas».
En ce sens, le lecteur est amené à pénétrer dans l’univers de Jeanne, un monde marqué par l’eau. Mais encore, Maupassant n’est pas tendre avec Jeanne. Il en fait presque une martyre de son temps. Sa destinée apparaît étroitement liée à sa condition d’aristocrate prisonnière du bon vouloir de l’homme, de la religion, du fils héritier.
De surcroît, j’ai apprécié les descriptions de la nature reliées aux états d’âme de Jeanne et au temps qui passe. Il y a de superbes scènes dans le récit l’illustrant. En voici un exemple :
«Et une atroce réflexion lui vint : – si petite mère n’était pas morte, par hasard, si elle n’était qu’endormie d’un sommeil léthargique, si elle allait soudain se lever, parler ? — La connaissance de l’affreux secret n’amoindrirait-elle pas son amour filial ? L’embrasserait-elle des mêmes lèvres pieuses ? La chérirait-elle de la même affection sacrée ? Non. Ce n’était pas possible ! Et cette pensée lui déchira le cœur.
La nuit s’effaçait ; les étoiles pâlissaient ; c’était l’heure fraîche qui précède le jour. La lune descendue allait s’enfoncer dans la mer qu’elle nacrait sur toute sa surface.
Et le souvenir saisit Jeanne de cette nuit passée à la fenêtre lors de son arrivée aux Peuples. Comme c’était loin, comme tout était changé, comme l’avenir lui semblait différent !
Et voilà que le ciel devint rose, d’un rose joyeux, amoureux, charmant. Elle regarda, surprise maintenant comme devant un phénomène, cette radieuse éclosion du jour, se demandant s’il était possible que sur cette terre où se levaient de pareilles aurores, il n’y eût ni joie ni bonheur.» (p. 214)
Je trouve ce recours à la nature pour illustrer le temps sublime. Quel talent! Le lecteur ressent bien le lien entre l’intériorité et l’extériorité. Dans la chambre, c’est la mort, l’obscurité. À l’extérieur, c’est la beauté, la clarté, la possibilité, la vie et Jeanne n’y a pas accès. Et, c’est cruel. J’adore…
Devez-vous lire Une vie de Maupassant? Absolument. Je crois que si je n’avais pas lu ce récit, ma vie de lectrice aurait été incomplète. Un moment de pur bonheur.
Que pensez-vous de mon texte? Avez-vous lu Une vie?
Bien à vous,
Madame lit
Maupassant, Guy. (2020). Une vie. Paris : Gallimard, coll. folio classique, 350 p.
ISBN : 978-2-07-041084-2

Cet article contient des liens d’affiliation grâce à un partenariat avec la coopérative des Librairies indépendantes du Québec. Vous pouvez commander Une vie par le biais du site Web des Libraires grâce à un lien sécurisé.
Merci pour le partage qui me donne envie de relire ce très beau roman.
J’aimeAimé par 1 personne
Merci à toi! Si je t’ai donné le goût de le relire, alors, je suis contente car c’est vraiment un excellent roman avec un personnage inoubliable. Au plaisir!
J’aimeJ’aime
Je ne suis pas sûre d’avoir lu celui-ci, mais en général j’aime bien ou beaucoup Maupassant. En y repensant, je crois que notre professeure de français au lycée nous en avait parlé avec émotion. J’aime bien ce que tu dis sur Jeanne et la nature. J’espère que je m’en souviendrai quand je le lirai.
J’aimeAimé par 1 personne
Jeanne est très beau personnage. Elle est victime de son époque… Je crois que tu ne pourras pas passer à côté des descriptions de la nature reliées aux états d’âme de Jeanne. Bonne lecture et merci!
J’aimeJ’aime
J’avais été très séduite par ce roman et ce personnage de femme qui perd ses illusions de jeunesse et qui découvre la réalité ! C’est un livre magnifique ! Merci beaucoup d’en avoir parlé. Bonne journée 🙂
J’aimeAimé par 1 personne
Nous partageons alors le même avis. Jeanne est vraiment un magnifique personnage. Merci et bonne fin de journée! 🙂
J’aimeAimé par 1 personne