«Être femme ici, c’est être une blessure ouverte qui ne peut guérir. Même si les cicatrices se forment, le pus est toujours tapi en dessous.» (p. 189)
Chère lectrice, Cher lecteur,
Pour souligner le mois de l’histoire des Noirs, permettez-moi de partager avec vous mes impressions sur Un don de Toni Morrison. Comme je n’avais encore rien lu de cette grande écrivaine afro-américaine, prix Nobel de littérature en 1993, je me suis dit qu’il était temps de sortir un de ses livres de ma bibliothèque. Alors, célébrons le mois de l’histoire des Noirs en abordant un roman rempli d’humanisme, de vérité, de féminité.
Madame lit et Un don
Trois femmes et une Mistress offrent un portrait féminin d’une Amérique d’avant les États-Unis, d’avant le racisme, d’avant le massacre des autochtones. Au XVIIe siècle, Rebekka est envoyée par son père sur un bateau qui se dirige vers l’autre continent. Elle doit épouser un colon, Jacob Vaark. Elle traverse l’Atlantique dans la cale, à côté des prostituées. Arrivée en Amérique, elle épouse tout de suite Jacob Vaark et elle apprend à vivre à ses côtés dans sa ferme. Puis, le couple accueille Lina, une jeune survivante indienne, Sorrow, une adolescente blanche et Florens, une fillette noire alors que leurs enfants meurent tour à tour. Mais encore, la variole décime la population. Quel sort attend les femmes gravitant autour de Jakob et de sa ferme?
J’ai été éblouie par la plume de Toni Morrison et par sa façon de raconter une histoire. Je ne voulais pas débuter par son grand succès Beloved car je trouvais le sujet de ce dernier trop difficile. Alors, Un don m’a permis de plonger dans un univers et de découvrir des femmes attachantes remplies d’humanisme dans des conditions difficiles. Parfois, l’amour éclaire le chemin.
«Nous ne façonnons jamais le monde», dit-elle. C’est le monde qui nous façonne.
-Tu es celui qui me façonne et tu es aussi mon monde». (p. 86)
Ce monde conditionne le devenir et l’aliénation des uns et des autres. Sommes-nous réellement des êtres libres? Sommes-nous écrasés par le poids de la société qui dicte notre conduite? Toutes ces questions peuvent se manifester dans la tête de la lectrice ou du lecteur après avoir lu Un don.
Mais encore, le portrait de ces femmes où la couleur de la peau peut déterminer le sort des êtres, permet à l’autrice d’aborder des thèmes qui lui sont chers comme l’esclavage et la servitude.
Au début, l’autrice présente cette remarque :
«En supprimant la manumission, les réunions, les déplacements et le port d’armes pour les Noirs, en autorisant tout Blanc à tuer tout Noir pour n’importe quelle raison, en offrant des compensations aux propriétaires pour la mort ou la mutilation d’un esclave, ils séparèrent et protégèrent les Blancs de tous les autres et pour toujours. » (p. 17)
Puis :
«Tu dis que tu vois des esclaves plus libres que des hommes libres. L’un est un lion dans la peau d’un baudet. L’autre est un baudet dans la peau d’un lion. Que c’est le flétrissement à l’intérieur qui rend esclave et ouvre la porte à ce qui est sauvage». (p. 186)
Par ailleurs, l’autrice pose une question fondamentale : «Les humains sont-ils responsables de leur servitude? Désirent-ils s’en libérer? »
Devant la mort du maître et de la mort possible de la Mistress de la variole, les femmes vivant à la ferme pourront-elles survivre? :
«-Ne meurs pas, Miss. Ne meurs pas. […] Femmes et illégales, elles allaient devenir des intruses, des squatteuses, si elles restaient là après la mort de Mistress.» (p. 73)
Je trouve que cette lecture s’avère essentielle pour comprendre ce qui s’est passé en Amérique et toute la sauvagerie ayant donné lieu à une terre meurtrière. Le rêve américain, pour moi, a été créé à partir du sang coulant dans les veines de ceux qui n’avaient pas la peau blanche.
C’était ma lecture pour souligner le mois de l’histoire des Noirs. Au Canada, le thème 2022 est le suivant : « En février et en tout temps : Célébrons l’histoire des communautés noires aujourd’hui et tous les jours ».

Avez-vous lu des romans de Toni Morrison?
Bien à vous,
Madame lit
MORRISON, Toni (2009). Un don, traduit de l’anglais (États-Unis) par Anne, WILKE. Paris : Christian Bourgois éditeur, coll. 10/18, 192 p.
ISBN : 978-2-264-02894-3

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J’ai un livre d’elle chez moi (intitulé « Home ») mais ne l’ai pas encore lu…
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D’accord. On pourra en reparler alors. Merci!
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