«Et la vie pour moi a jamais été un escalier de cristal». (p. 22)
Chère lectrice, Cher lecteur,
En cette Journée internationale des droits des femmes, permettez-moi de partager mes impressions sur un roman mettant en scène un personnage féminin fort : Marion Willow. Je tiens par ailleurs à remercier Linda Leith Éditions de m’avoir fait parvenir En bas de la côte en service de presse. Ce roman fait partie du catalogue du printemps 2022.
Tout d’abord, qui est Mairuth Sarsfield?
Selon la maison d’édition :
« Née à Montréal en 1925, Mairuth Sarsfield a mené une carrière d’autrice, militante, communicatrice et diplomate, et fut l’une des premières femmes noires à siéger au conseil d’administration de la Société Radio-Canada. Elle a notamment travaillé à l’organisation des expositions universelles de Montréal (Expo67) et d’Osaka (1970). À partir de 1970, elle a travaillé pour le gouvernement, à l’échelle nationale puis internationale, entre autres comme attachée de presse de la délégation canadienne à l’ONU, puis à l’ambassade du Canada à Washington. À titre d’officier supérieur en information pour le programme Environnement des Nations Unies à Nairobi au Kenya, elle a créé le programme « Un arbre pour chaque enfant ». Parmi les honneurs qui lui ont été décernés, soulignons l’instauration de la « Mairuth Sarsfield Day » à Cleveland en reconnaissance de son travail pour l’environnement. En 1986, Mairuth Sarsfield a été faite Chevalière de l’Ordre national du Québec. Elle est décédée en 2013 à l’âge de 88 ans.»
Il va sans dire que Mairuth Sarsfield mérite toute notre admiration pour son impressionnante carrière.
En bas de la côte
Dans le quartier de Petite-Bourgogne de Montréal, une jeune veuve de 32 ans, Marion Willow, doit élever ses filles Pippa, Effie et Emily. Elle le fait avec le meilleur de ses compétences grâce à la communauté noire à laquelle elle appartient. Alors que les bombes éclatent en Europe durant la Deuxième guerre mondiale, Marion doit lutter contre le racisme, le sexisme et les injustices sociales. Marion a un grand coeur et elle sait tisser des liens pour améliorer le sort des siens. Elle travaille au YMCA de Westmount en tant que femme de chambre et elle souhaite que ses filles puissent aller à l’université. Elle est fière, elle est forte et elle aime sa chatte Pitti-Sing.
Ce que j’ai pensé de ce roman
Je crois bien que je n’avais jamais lu de livre mettant en scène la communauté noire de Montréal. Et je trouve que cela manquait à ma culture. En ce sens, j’ai beaucoup aimé cette histoire. Les personnages sont attachants et ils m’ont permis de voyager dans ce Montréal qui n’était pas trop évident pour les noirs et surtout, pour les femmes noires seules devant élever leurs enfants. De plus, j’ai appris que pour les hommes, le seul travail possible était de travailler pour le chemin de fer.
J’ai parfois souri surtout lorsque les filles de Marion se retrouvent à la campagne pour passer un été et elles se font passer pour des cannibales. Les gens avaient des préjugés terribles à l’égard des noires… Je n’en reviens pas. Cependant, l’autrice ne porte pas de jugement. Elle raconte les faits et elle veut offrir un témoignage car comme il est mentionné dans la préface : «Un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle». Elle a voulu en quelque sorte rendre hommage à une communauté qui a grandement contribué au développement de Montréal et du Canada.
Mais encore, j’ai réalisé que certaines injustices faisaient encore partie de la société québécoise. Dans ce récit, il est question du sort des immigrants diplômés et je trouve que c’est encore bien présent. Combien de chauffeurs de taxi sont des immigrants possédant des diplômes non-reconnus par les instances gouvernementales? Voici le sort d’Edmond :
«En immigrant au Canada, comme il devait payer des taxes sur son acquisition et survivre à un hiver rigoureux, Edmond prit le seul emploi offert aux pharmaciens noirs : celui de porteur Red Cap, qui transporte à la gare Windsor, à Montréal. Kofi, le mari de Marion originaire d’Afrique, avait occupé le même poste pendant ses études en médecine dentaire à l’Université McGill.» (p. 36)
À cet égard, une goutte de sang africain peut être fatale pour le devenir d’une personne et lui infliger une classe sociale. Défendre ses droits devient la seule possibilité.
En plus d’être noire et d’être une femme cherchant à revendiquer son indépendance, Marion doit être forte pour aider ses filles à devenir de meilleurs êtres humains. Comme il est mentionné à propos de la lutte pour les droits des femmes :
-«Ne soyez pas naïve Marion. Il n’y a rien à célébrer et rien à pleurer. On se réjouira quand la moitié des membres de la Cour suprême du Canada seront des femmes». (p. 324)
Peut-on célébrer aujourd’hui?
Je dirais que ce livre est essentiel pour comprendre qui nous sommes en tant que société. Je mentionne souvent que pour savoir où l’on va en tant que société, il faut savoir d’où l’on part. Pourquoi ne parle-t-on pas plus de la communauté noire de Montréal dans la littérature québécoise? Je ne sais pas… Mais, je tiens à remercier Linda Leith Éditions de présenter ce très beau récit et en plus, c’est la première fois qu’il est offert en français.
Devez-vous le lire? Oui. Vous allez danser sur des airs de jazz et vous allez certainement vous attacher à Marion, à ses filles et à son entourage. Grâce à ce livre, on sait que le chemin pour l’égalité des femmes immigrantes a été parsemé d’embûches et qu’il le sera sans aucun doutes encore… En bas de la côte parle à notre coeur et il illumine le ciel de la communauté noire trop souvent oubliée dans notre littérature. Merci Mairuth Sarsfield.
Que pensez-vous de mon article?
Bien à vous,
Madame lit
SARSFIELD, Mairuth. (2022). En bas de la côte, traduit par Rachel MARTINEZ. Montréal : Linda Leith Éditions, 344 p.
ISBN 978-1-77390-111-4
Cet article contient des liens d’affiliation grâce à un partenariat avec la coopérative des Librairies indépendantes du Québec. Vous pouvez commander En bas de la côte de Mairuth Sarsfield par le biais du site Web des Libraires grâce à un lien sécurisé.
Un plaisir de lire ce texte pour quelqu’un qui habite Montréal depuis plusieurs années. Ton article nous renvoie aux problèmes que l’on retrouve encore à Montréal dans certains quartiers.
Vivre avec d’autres est très instructif et j’ai le goût de lire ce livre.
Et quand on voit ce qui se passe actuellement, on ne peut que dire que ce livre est d’actualité.
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Merci beaucoup! Je crois qu’effectivement ce livre est très intéressant pour les Montréalais au même titre que «Bonheur d’occasion» ou encore «Les chroniques du Plateau Mont-Royal». Sauf que cette fois, c’est de la communauté noire dont il est question. Je ne crois pas qu’il existe un aussi juste portrait et aussi bien documenté… Au plaisir!
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