«[…] les poèmes de mademoiselle Emily non plus n’ont pas d’ombre. Ces poèmes sont des ombres blanches, des textes tissés à même les silences entre les mots, une maison faite en fenêtres.» (p. 178)
Chère lectrice, Cher lecteur,
J’ai décidé de lire Les ombres blanches de Dominique Fortier, la suite des Villes de papier, car il me tardait de replonger dans l’univers bien particulier d’Emily Dickinson, figure majeure de la littérature américaine du 19e siècle. Dominique Fortier avec Les villes de papier a remporté le prestigieux prix Renaudot dans la catégorie essai. Avec ce dernier, elle nous raconte la naissance jusqu’à la mort d’une poétesse, par le biais du deuxième, elle nous présente la naissance d’un livre, celui d’Emily, après sa mort.
Les ombres blanches
Emily Dickinson est morte et pourtant, elle habite l’espace des siens. Elle est partout et nulle part. Sa soeur Lavinia, à la demande d’Emily, brûle toutes ses lettres. Par hasard, Lavinia découvre les nombreux poèmes de sa soeur. Elle prend alors une très importante décision : les poèmes de sa soeur doivent être publiés afin qu’elle ne soit pas oubliée. Elle consulte alors Higginson, un correspondant d’Emily, pour qu’un recueil soit créé. À cet égard, il est question de la naissance du livre d’Emily par l’entremise des siens (Susan, sa belle-soeur, Mabel, la maîtresse de son frère, Millicent, la fille de Mabel). Sans ces femmes, le monde des lettres américaines aurait été bien différent…
Ce que j’ai pensé des Ombres blanches
Si vous aimez les livres, il vous faut découvrir ce bouquin. J’ai adoré retrouver la plume de Dominique Fortier et lorsque j’ai appris que la suite des Villes de papier avait été publiée, je me suis dirigée dans une librairie indépendante pour me le procurer. Quel plaisir de vivre encore dans l’univers de Dickinson. C’est tout de même étonnant de penser que sans les femmes qui aimaient Emily, jamais nous n’aurions pu la lire… Je n’en reviens pas. À cet égard, j’ai adoré partagé avec les personnages la naissance du recueil de poésie, d’avoir accès à leurs pensées sur les poèmes d’Emily. J’ai perçu à quel point il s’avérait difficile de se mettre dans la peau d’une disparue tant aimée pour en arriver à l’essence de sa parole, car les vers d’Emily relèvent de la lumière.
«Emily ne parle jamais d’une seule chose ou depuis un seul lieu; elle parle d’à côté de l’amour, de derrière la mort, de l’intérieur de l’oiseau». (p. 203)
Aussi, en abordant le processus de création du recueil, la narratrice propose également des réflexions sur la lecture. Et juste pour la suivante, il faut aller à la rencontre de cette histoire.
«Ouvrir un livre, c’est se retrouver au-dehors (de soi, du monde qui nous entoure) en même temps qu’au plus près des êtres et de ses propres secrets, par le prodige de cet autre monde inventé ou sauvé du temps. » (p. 154)
Merci Dominique Fortier d’écrire de telles phrases. Elles font du bien à l’âme.
Mais encore, le thème de la mort est particulièrement développé dans Les ombres blanches. Il est beaucoup question des fantômes qui nous habitent, du sens de la vie, de ce que nous laissons aux autres comme héritage. Dès le départ, il est mentionné :
«Qu’a -t-elle fait du poème de sa vie?» (p. 45)
Ou encore plus loin :
«À quoi mesure-t-on une vie?» (p. 119)
Je me suis énormément retrouvée dans cette façon de percevoir la vie et la mort qui est exploitée dans l’histoire. Je ressens l’émotion de Lavinia lorsqu’elle se déplace au cimetière :
«Ce qui la frappe à ce moment-là, en plein soleil : ses fantômes n’habitent pas la maison, ni même le cimetière, c’est elle qu’ils habitent, elle les transporte partout où elle va. Elle est, nous sommes des assemblages de poupées russes, spectres, souvenirs, disparus, jusqu’au coeur en bois vivant et mort à la fois, jamais à l’abri d’une flambée.» (p. 127)
J’aime lorsqu’un livre me fait réfléchir, lorsqu’il me permet de visiter l’intérieur de mon âme, lorsqu’il fait jaillir dans la lumière mes chers disparus. Mon expérience de lecture a surtout été ça. Lire pour se retrouver, lire pour exulter des émotions, lire car ce n’est pas mourir, c’est revivre.
Alors, si vous n’avez pas encore lu Les villes de papier, il faudrait débuter par ce dernier et ensuite, courez vite acheter Les ombres blanches. C’est tout, sauf ennuyant. C’est Emily Dickinson vue par une autrice de chez nous.
J’ai lu cette autobiographie dans le cadre du Printemps des artistes 2022 organisé par La Bouche à Oreilles.
Que pensez-vous de mon billet?
Bien à vous,
Madame lit
FORTIER, Dominique (2022). Les ombres blanches. Québec : Alto, 243 p.
ISBN 978-2-89694-518-4
Cet article contient des liens d’affiliation grâce à un partenariat avec la coopérative des Librairies indépendantes du Québec. Vous pouvez commander Les ombres blanches ou Les villes de papier de Dominique Fortier par le biais du site Web des Libraires grâce à un lien sécurisé.
Très passionnée par Emily Dickinson (la poète et la personne qu’elle était) je vais noter ce livre et l’acheter dès que possible. Bonne journée Nathalie et merci d’avoir présenté ce livre !
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Merci Marie-Anne. Le premier tome a été publié en France. Tu devrais le trouver facilement. Pour le deuxième, il va probablement falloir attendre un peu. Au plaisir!
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Ah tant mieux ! Bien contente de l’apprendre 🙂 Bonne journée !
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Ton article donne le goût de lire ce livre mais je dois débuter avec Villes de papier. Je retiens deux passages de ton texte qui me plaisent particulièrement : le processus de création du recueil et les réflexions sur la lecture…
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Oui, il faut débuter par «Les villes de papier». Je crois que la vie de la poétesse pourrait certainement te plaire. Elle est devenue un mythe! Merci pour ton commentaire!
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