Madame lit Orlando de Virginia Woolf

Orlando
«Le mien est Orlando», dit-elle. Il l’avait deviné. Car si vous voyez un navire toutes voiles dehors s’avancer sous le soleil majestueusement, traversant la Méditerranée depuis les mers du Sud, vous vous dites tout de suite, «Orlando», expliquait-il. » (p. 533)
Chère lectrice, Cher lecteur,
Comme vous le savez, je participe au défi littéraire organisé par Moka et Fanny : Les classiques, c’est fantastique. Pour mars 2023, les organisatrices ont décidé de mettre à l’honneur Virginia Woolf. Pourquoi?
«Mois de la journée internationale des droits des femmes, autrice à l’honneur en ce mois classique. Et cette année, il s’agit de lire celle qui divise tant, à savoir la grande Virginia Woolf.»
J’ai déjà abordé dans mon article sur Vers le phare mon admiration pour Virginia Woolf. Je ne peux que saluer son talent, sa profondeur, sa perception du monde. Alors, en ce mois lui étant consacré, j’ai décidé de lire Orlando dans l’édition Quarto Gallimard que je possède. Je voulais lire cette histoire où l’androgynie s’avère le thème central. On a déjà beaucoup parlé du lien entre ce livre et la poétesse Vita Sackville-West à qui d’ailleurs il est dédié. Alors, je ne me pencherai pas sur cet élément. D’autres en ont fait leur partie mieux que moi.
Orlando et Madame lit
Dans ce récit, je suis allée à la rencontre de la biographie d’Orlando, être androgyne, fascinant, étonnant sur une période de 400 ans. Tout d’abord, je l’ai vu en tant que jeune aristocrate à la Cour de la reine Élizabeth 1ère, puis tomber amoureux de Sasha, fille de l’ambassadeur de Russie. Cette dernière lui joue un mauvais tour en l’abandonnant. Il retourne dans sa vaste demeure le coeur brisé où il dort durant une semaine. À son réveil, il quitte l’Angleterre et il part pour exercer les fonctions d’ambassadeur à Constantinople.
Après une révolution, il tombe encore dans un sommeil qui dure une semaine et il se réveille en tant que femme. Il vit alors avec des tziganes qui lui apprennent, en autres, à être libre en femme, ce qui n’est pas le cas en Angleterre.
Elle retourne finalement dans son pays natal poussée par son amour de la poésie. Elle tombe amoureuse de Lord Marmaduke Bonthrop Shelmerdine qui s’avère une femme en homme et elle l’épouse car c’est dans l’esprit du temps.
Les jours s’écoulent et Orlando vit à Londres où elle devient célèbre grâce à son poème «Le Chêne» amorcé au début de l’histoire et sur lequel elle a travaillé toute sa vie. Sa biographie se termine le jeudi 11 octobre 1928.
Je m’attendais à beaucoup de ce récit et je crois qu’il me fascinait depuis longtemps. Je me demandais comment Virginia Woolf allait traiter son personnage androgyne et quelle serait son histoire. Je n’ai pas été déçue. Au contraire. Durant ma lecture, j’ai retrouvé le charme de la plume de Virginia Woolf que je trouve vivante et proche de la nature. Dans son Journal daté du samedi 22 octobre 1927, elle mentionnait à propos d’Orlando qu’elle voulait que sa lectrice ou son lecteur «comprenne chaque mot». J’ai pris le temps de savourer ce livre et j’ai aimé surtout l’esprit du temps qui hante chaque siècle. Ainsi, Orlando à la fin de sa biographie apparaît marqué par ses différents moi qui se sont modelés à cet esprit du temps. Comme il est soulevé :
«Choisissant donc ces seuls moi que nous avons pu loger, Orlando aurait pu maintenant appeler le garçon qui coupait la tête de nègre; le garçon qui la raccrochait; le garçon qui était assis sur la colline; le garçon qui avait vu le poète; le garçon qui avait tendu à la reine le bol d’eau de rose; ou elle aurait pu s’adresser au jeune homme qui était tombé amoureux de Sasha; ou au Courtisant; ou à l’Ambassadeur; ou au Soldat; ou au Voyageur; ou elle aurait pu désirer que la femme vienne à elle; la Gitane; la Belle Dame; l’Ermite; la fille amoureuse de la vie; la Patronne des Lettres; la femme qui appelait Mar (entendant par là bains chauds et feux de cheminée) ou de Shelmerdine (entendant crocus dans les bois d’automne) ou Bonthrop (entendant la mort dont nous mourons chaque jour) nous tous les trois ensemble- ce qui signifie plus de choses que nous n’avons de place pour les écrire au long-, tous étaient différents et elle aurait pu convoquer n’importe lequel d’entre eux.» (p. 568)
On dirait une longue phrase de Proust n’est-ce pas? Ce livre permet à Virginia Woolf d’aborder aussi des thèmes reliés au domaine des Lettres, à celui du développement technologique, au rôle social attribué à l’homme ou à la femme, mais aussi et surtout, au temps qui passe encerclé par la vie et la mort.
Orlando est un personnage magnifique, illuminé, beau, intelligent, etc. Il souhaite s’abreuver à la liberté, celle d’être, celle de vivre, celle d’aimer, celle de mourir, celle d’écrire.
Ce n’est certes, pour certaines ou pour certains, une lecture facile. Pour moi, lire du Virginia Woolf, c’est toujours une aventure marquée par le mélange des sens et de la nature. Il y a du rythme, il y a du sens.
«Un poète, c’est l’Atlantique et le lion en une seule personne». (p. 507)
Sally Potter a réalisé un film à partir de ce récit. Voici la bande-annonce que j’ai retrouvée sur YouTube :
Je ne peux que vous encourager à lire du Virginia Woolf. De mon côté, ce ne sera pas ma dernière lecture.
Ce bouquin a été lu dans le cadre du défi Les Classiques, c’est fantastique créé par Moka et Fanny . En mars, la grande Virginia Woolf était à l’honneur.
Avez-vous lu Orlando? Qu’avez-vous pensé de votre lecture?
Bien à vous,
Madame lit
WOOLF, Virginia. (2014). Orlando, traduit de l’anglais par Jacques Aubert. Romans, essais.Paris : Gallimard, p. 393- 580.
ISBN : 978-2-07-014498-3
Vous avez remarqué une faute dans mon article? Écrivez-moi à lit.madame@gmail.com et il me fera plaisir de la corriger. Je ne suis pas parfaite… et il m’arrive aussi d’en faire. Merci et bonne lecture!!!
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Je n’ai jamais lu Orlando… pour tout t’avouer, je n’ai encore jamais lu Virginia Woolf, mais j’y compte bien. Et ce roman que tu viens de terminer me semble être d’une grande modernité. Lequel ou lesquels me conseillerais-tu pour faire sa rencontre?
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Celui-ci car selon Virginia Woolf, il est son plus accessible. Après, Mrs Dalloway, Les Vagues, Vers le phare. Et tu as raison, ce récit est d’une grande modernité.Merci!
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Bonjour Nathalie, je n’ai pas lu « Orlando » mais j’ai vu le film dont tu parles à la fin de ton article et qui était très esthétique, si je me souviens bien.
Je suis d’accord avec toi, les livres de Virginia Woolf sont extraordinaires…
Merci ! Bonne journée 🙂
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Merci à toi et bonne fin de journée!
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J’aime beaucoup ce roman. Il a un style tellement différent de celui des autres romans de l’écrivaine que j’ai lus. Il y a du fantastique, du satirique dans ce magnifique roman. J’ai aussi aimé ce qu’elle en dit dans son Journal au moment de son écriture.
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Cela doit très intéressant pour toi de faire des liens entre ce que Virginia Woolf écrit dans son journal et ce qui est présenté dans «Orlando». Je ne sais pas si je vais un jour me lancer dans la lecture du Journal de Virginia Woolf, mais elle est une écrivaine que j’adore… Merci!
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J’aime beaucoup les essais de Woolf, un peu moins ses textes de fiction (j’apprécie tout de même). J’ai été très surprise par « Orlando » et je pense qu’il me faudrait le relire pour l’apprécier pleinement (j’avais bien aimé, sans plus et, pendant ma lecture, j’avais conscience de passer à côté de quelque chose). Bref, je compte bien lui laisser sa chance – au pire, j’aimerais juste 😉
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Parfois, il faut laisser reposer un texte, un livre, et le relire plus tard, au moment opportun. Avec Virginia Woolf, c’est une fenêtre qu’il faut être prête à ouvrir, ensuite, il faut se laisser bercer par sa perception. Merci!
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Tu attires mon attention sur ce livre, mais tu confirmes aussi ce que je pense, à savoir qu’ il est préférable d’être disponible pour cette lecture et d’en avoir vraiment envie pour prendre son temps et l’apprécier. Je pense que je découvrirai plutôt son oeuvre avec des textes de non fiction dans un premier temps.
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Bonne découverte alors et bonne continuation avec ses essais. Je vais m’y mettre aussi. Merci!
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Ses essais seront également une découverte car je ne l’ai jamais lue (j’avais abandonné Mrs Dalloway il y a longtemps…).
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D’accord. Merci pour la précision.
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Comme ton article est beau et ton enthousiasme communicatif !
Cela donne envie de prolonger cette parenthèse de mars très Virginia.
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Je me l’étais préparé pour ce mois-ci mais je n’ai finalement pas pris le temps de le lire. Ce sera pour une prochaine fois, il me tente énormément!
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J’ai bien aimé ce livre et je suis contente de l’avoir lu. Le défi me permet de sortir enfin les livres que je possède et que je veux lire depuis longtemps… Merci et j’espère que ce livre te charmera!
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