Madame lit Les voleurs d’innocence de Sarai Walker

« Les soeurs Chapel :
D’abord elles sont mariées
Puis elles sont enterrées».
Chère Lectrice, Cher Lecteur,
En juin, notre Club de lecture, Les têtes à Papineau, s’est penché sur le livre Les voleurs d’innocence de Sarai Walker. Ce bouquin avait attiré mon attention, car il avait été présenté dans les différents médias de communication en tant que roman gothique contemporain. Ma curiosité avait été piquée, car j’aime bien lire des romans gothiques. Donc, j’étais contente d’y plonger pour participer à ma rencontre mensuelle.
Les voleurs d’innocence
Il était une fois, dans une maison victorienne de style gâteau de mariage, aux États-Unis, dans les années 50, six jeunes filles aux noms de fleurs : Aster, Rosalind, Calla, Daphné, Iris, Hazel. Leur mère, Belinda Chapel, vit presqu’en recluse dans sa chambre. Le père, un riche industriel d’armes à feu, n’est présent que pour le repas du soir. La première des filles Chapel, Aster, se marie malgré le mauvais présage que ressentent sa mère et sa soeur cadette Iris. Puis, elle meurt. C’est une malédiction qui pèse sur les filles Chapel. Chacune épouse son amoureux, ensuite, elle meurt. Il n’y a qu’Iris qui échappe à la malédiction et qui réussit à survivre. Comment fait-elle ?
Mes impressions
Tout d’abord, ce livre apparaît très riche en références. Par exemple, j’ai appris que l’autrice avait créé le personnage de la mère, Belinda Chapel, en s’inspirant de la vie de la célèbre héritière de la fortune des Winchester: Sara L. Winchester. Il importe de rappeler sa légende qui ressemble à l’histoire des Chapel. Selon Wikipédia :
«La légende dira que Sarah Winchester s’était mise à croire que sa famille était traquée par les esprits, et qu’elle avait consulté des médiums pour savoir quoi faire. Un médium de Boston, lui aurait dit que les Winchester étaient traqués par les fantômes de toutes les personnes tuées par les carabines Winchester, et qu’elle devait se rendre sur la Côte Ouest des États-Unis afin d’y construire une maison pour elle et les fantômes, ajoutant que si la construction cessait un jour, elle mourrait. Les travaux d’historiens, dont l’historienne Mary Jo Ignoffo, remettent en question cette légende et proposent une vision d’une dame immensément fortunée et excentrique, mais femme d’affaires avisée, indépendante et discrète, qui ne se souciait guère de la réputation de spiritualisme que la presse et les voisins lui inventaient[2].»
Belinda vient d’une famille où les femmes meurent en accouchant. D’ailleurs, c’est elle qui brise la lignée. Mais, elle entend toujours sa mère et elle sent sa présence par le biais du parfum des roses. Comme Sarah Winchester, elle voit les fantômes de ceux qui sont morts sous les balles des fusils Chapel. Elle sait qu’une malédiction pèse sur ses filles. Iris est la seule à l’écouter. Comme le relève cette dernière :
« Voilà les histoires que nous racontait notre mère quand nous étions enfants. Nous savions qu’elle avait passé ses premières années à hurler et qu’elle n’avait jamais voulu épouser notre père. Mais le récit de sa vie s’arrêtait inévitablement le jour de son mariage, comme la majorité des contes de fées. La plupart des enfants n’imaginent pas que leur mère a eu une vie avant eux, mais, pour mes sœurs et moi, c’était l’inverse. Le mariage était toujours la fin de l’histoire. Nous étions l’épilogue. »
Le mariage dans le récit est associé à la mort. Belinda est perçue par ses filles, sauf Iris, comme une folle. Dans un monde où domine le patriarcat, comme dans cette société aisée américaine des années 50, la seule possibilité pour les filles Chapel d’échapper à leur vie, est le mariage (s’occuper de leurs maisons, de leurs maris, de leurs bébés, etc.). Belinda n’a jamais voulu de cette vie de femme mariée et Iris va tout faire pour y échapper. La situation de la mère apparaît dégradante. Ce ne sont pas les fantômes qui sont terrifiants ou encore la malédiction qui pèse sur la famille. C’est ce qui attend les jeunes femmes mariées Chapel qui doivent obéir à leur époux lors de la nuit de noces.
La folie est un thème relevant du gothique littéraire. Par exemple, dans le récit, on retrouve la folie de la mère, des filles après le mariage lorsqu’elles reviennent à la maison, la folie d’Iris. Comme le relève cette dernière à la toute fin :
« Mais je crois que j’ai fini par comprendre que c’est mon destin d’être une de ces folles. Une de ces femmes qui disent la vérité, aussi terrifiante soit-elle. Une de ces femmes qui se tiennent à l’écart de la foule, se concentrant non pas sur les visages en colère et désapprobateurs, mais au-dessus d’eux, sur le ciel bleu jacinthe éclatant qui ressemble aux fleurs qui poussent dans son jardin. »
J’ai passé un excellent moment de lecture. J’aime ces histoires possédant des maisons terrifiantes, des fantômes ou des esprits qui se promènent un peu partout au fil des pages. La vie, l’amour et la mort sont indissociables.
Cette lecture me permet de participer aussi au défi organisé par Mokamilla : Quatre saisons de pavés. Ce sera mon second pavé lu au printemps.
Je recommande cette histoire :
- Pour le style gothique
- Pour découvrir le beau personnage d’Iris
- Pour l’intersexualité qui façonne ce livre
L’avez-vous lu ? Aimez-vous le style gothique en littérature ?
Bien à vous,
Madame lit
Sarai Walker, traduit de l’anglais par Janique Jouin-de Laurens, Paris, Gallmeister, 2023, 620 p.
ISBN : 978-2-35178-287-3
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Un roman gothique que j’avais beaucoup apprécié ! le destin des filles « à marier » est symbolique, mais ce n’est pas trop lourdement souligné. Il y a de belles images dans l’écriture !
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Je suis bien d’accord à part pour la première… Un vrai carnage ! 🙂 Merci beaucoup pour ce commentaire !
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J’avais déjà repéré ce titre ici : https://aleslire.wordpress.com/2024/07/30/les-voleurs-dinnocence-sarai-walker/
Je vois que tu confirmes qu’il vaut le détour…
Ingannmic (https://bookin-ingannmic.blogspot.com/)
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C’est un « page-Turner » alors, pour l’été, c’est parfait! En plus, le lecteur doit chercher des références un peu partout. Merci!
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Très très tentant…merci pour cette chronique !
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Merci pour cette lecture de mon article! 🙂
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Bonjour Nathalie, j’ignorais qu’il existait du gothique contemporain et ne connaissais pas cette écrivaine. L’histoire a l’air originale ! Jusqu’à présent je n’ai lu qu’un seul roman gothique, Frankenstein de Mary Shelley et il y avait aussi un personnage féminin qui mourait pendant sa nuit de noces – très symbolique ! Merci de ta chronique, bonne journée à toi 📚🤩✨️🌿🌹
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Merci Marie-Anne! En fait, il existe plusieurs romans gothiques contemporains. V ce l’est intéressants. Je crois que si je recommençais mes études littéraires, je choisirais ce courant. Dans ce livre, les femmes meurent après leur nuit de noces, d’où le titre. Bonne fin de journée! 🌞🌷📖
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Je vois qu’il plaît beaucoup ! Je n’aime pas les romans gothiques, mais je comprends bien que toute la symbolique y est très riche.
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De toute façon, je crois que ta PAL est bien garnies! 😉 Merci!
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Oui, je n’ai pas à me plaindre de ce côté-là 😅
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Ta présentation (notamment ta conclusion thématique) donne furieusement envie de s’y plonger. RDV en été pour un nouveau pavé !
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Merci! Oui, je viens de débuter mon pavé d’été! 🙂
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