Madame lit Récits de la cabane abandonnée de Grey Owl
« «N’oubliez pas que vous appartenez à la nature, vous ne la possédez pas». (p.7) »
— Grey Owl
Chère lectrice, Cher lecteur,
Moka et Fanny organisent la saison 3 du défi littéraire : Les classiques, c’est fantastique. Pour décembre, elles ont présenté la consigne suivante :
«L’appel du Grand Nord.Grand froid, Grand Nord. Les grandes contrées s’offrent à nous en décembre. Scandinavie, Sibérie, Alaska, Groenland, Canada… On sort les plaids et on se réchauffe au coin du feu en attendant le Grand Barbu ! Possibilité de choisir des auteurs et autrices classiques originaires de ces grandes terres du Nord ou des classiques s’y déroulant!»
À cet égard, j’ai choisi de lire Récits de la cabane abandonnée d’un homme extraordinaire, le garde forestier le plus célèbre du Canada, un Britannique, Archibald Belaney, qui a décidé de venir s’établir en sol canadien à l’âge de dix-huit ans et il est devenu une légende : Grey Owl, Hibou gris, un Amérindien. Alors, je voulais découvrir un bouquin de Grey Owl car le Grand Nord, il le connaît, il l’a arpenté, il y a chassé. Aussi, il est devenu un précurseur de la défense de la nature; il est reconnu comme étant un grand écologiste canadien. En repensant à ses années sur le terrain, Grey Owl livre un incomparable témoignage sur une époque aimée.

Donc, je dois dire que cette thématique du Grand Nord avait tout pour me plaire car j’adore nos hivers, nos vents de froidure et nos animaux majestueux dans un décor féérique.
Récits de la cabane abandonnée de Grey Owl
«Ainsi, lecteur inconnu, mon ami, si vous avez à perdre une heure de votre temps, venez vous asseoir avec moi parmi les Esprits d’autrefois. J’essaierai de vous faire connaître un peu l’âme du Grand Nord indomptable, les souffrances, les luttes et les joies d’hommes et de bêtes qui ne sont plus.» (p. 31)
À travers treize récits, Grey Owl aborde, entre autres, la vie dans le Grand Nord, il relate ses histoires de trappe dans la neige, il décrit les êtres qu’il y a rencontrés comme un Sage, les fils de Kee-Way-Keno ou encore Red Landreville et ses histoires. Mais encore, dans le Grand Nord, il faut respecter des traditions pour ne pas mourir, comme celle de laisser toujours de la nourriture dans une cabane abandonnée pour son prochain. Grey Owl invite son lecteur à suivre ses pas malgré la neige, malgré le froid, malgré le chant des loups. Il devient son guide pour ne pas oublier comment on vivait dans les contrées du Grand Nord canadien (les Grandes Solitudes) au début et à la moitié du vingtième siècle. C’est un beau témoignage sur la façon de vivre des autochtones qu’aimait tant Grey Owl. Ce mode de vie, il sent qu’il est menacé et il veut surtout lui rendre hommage.
Ce que j’ai pensé de ma lecture
J’ai énormément aimé lire les Récits de la cabane abandonnée de Grey Owl. J’ai particulièrement apprécié son dernier écrit : «L’arbre». De sa naissance jusqu’à sa mort, Grey Owl décrit le cycle de vie d’un pin. L’arbre fait la rencontre d’êtres ou encore d’animaux qui vont venir se réfugier sous ses branches comme des ours, des écureuils, des loups, etc. C’est beau. Il se permet aussi dans ce récit d’aborder les rites autochtones par rapport aux arbres. Mais encore, il relate ce que les peuples autochtones ont perdu après l’arrivée des Blancs. Désormais, l’alcool, l’exil et les cabanes construites sur des réserves par des Blancs font partie de leur réalité. Adieu le mouvement du vent dans les tipis. Les animaux aussi ne sont pas épargnés comme les troupeaux de bisons qui sont décimés et l’on ne retrouve que leurs ossements éparpillés un peu partout sur la voie ferrée.
«Les montagnes assistaient à cette fin dans un calme glacé, car elles savent que les arbres doivent mourir, ainsi que les hommes; elles seules demeurent éternellement. » (p. 223)
En ce qui concerne la difficulté de survivre dans le Grand Nord, la lectrice ou le lecteur la ressent très bien sous la belle plume de Grey Owl. Par exemple, dans une expédition, il fait la rencontre de la «Mort Blanche», c’est-à-dire qu’il devient aveugle en raison du froid et de la neige le frappant durant son avancée sur un lac gelé. C’est la cécité blanche. Les autochtones lui ont parlé d’elle.
«Je sus alors que j’étais aveugle. Je connus l’atroce impuissance, l’angoisse indicible de l’homme que frappe soudainement la cécité. Je parvins en rampant à me remettre sur pieds, tandis que la tête me tournait et que la réalité sinistre rugissait, eût-on dit, sous mon front. Les démons de la nuit me tenaient, j’étais aveugle… aveugle blanc… » (p. 182)
C’est difficile le froid et la neige. Il faut les apprivoiser, les connaître.
Mais encore, Grey Owl présente de magnifiques descriptions du paysage dans le Grand Nord. C’est comme si Grey Owl partageait une philosophie de vie associée à la beauté de vivre dans un tel décor. Il traite aussi des difficultés et du courage qu’il faut déployer lors des menaces. C’est comme si l’homme se trouvait et se définissait à travers elle.
«Sous les étoiles, l’Univers tout entier, comme pétrifié dans une sorte d’attente mystérieuse, semblait écouter, espérer on ne sait quoi qui ne se produirait jamais. Cela vous surprend camarades, mais c’est ainsi que ces terres du Nord nous fascinent. Vous comprendrez ce que je veux dire si jamais vous vous trouvez seuls au bout du monde et sentez que des déserts infinis s’étendent tout autour de vous- au-dessus de vous aussi- dans une scintillation silencieuse qui pèse à l’écraser sur votre âme. » (p. 126)
Grey Owl écrit très bien, sa plume est vivante et elle traverse notre imagination. Comme j’aime les paysages nordiques, j’ai apprécié cette lecture et je me suis retrouvée dans le message de l’auteur sur le fait que la nature est plus grande que tout et que les Blancs avec leur façon de vivre, ne sont plus en accord avec cette dernière. Et, nous sommes en 1936…
Ce bouquin a été lu dans le cadre du défi Les Classiques, c’est fantastique créé par Moka et Fanny car en décembre, il fallait lire un classique sur le Grand Nord. Je peux enfin dire que j’ai lu un bouquin du plus grand garde-chasse canadien.
Voici une vidéo présentant son amitié avec un castor. Il est également question de sa vie.
Aviez-vous déjà entendu parler de Grey Owl?
Bien à vous,
Madame lit
Owl, G. (2010). Récits de la cabane abandonnée. Éditions Souffles.
ISBN : 978-2-87658-083-1
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Quelle chance vous avez d’avoir un Grand Nord et ses défenseur de la vie! Nous en avons aussi dans nos forêts d’Ardennes belges. Je pense à un petit-cousin de mon épouse, garde forestiers dans l’Eiffel. Mais il faut avouer que sa protection des myrtilliers est moins romanesque que la sauvegarde du Grand Nord! Et pourtant, chacun à sa place contribue à la protection de la planète! C’est ce que j’ai perçu de la présentation de ce Grey Owl qui nous rappelle qu’on doit s’interroger sur la place que nous prétendons être la nôtre!
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Je crois qu’il faut réapprendre à nous définir par rapport à notre relation à la Nature. En 1936, Grey Owl avait déjà remarqué sa dégradation. J’ai grandi dans un endroit où l’on voit les baleines danser dans l’eau et je ne peux comprendre qu’elles soient encore chassées de nos jours alors qu’elles sont amenées à disparaître. Au Canada, nous avons aussi la chance d’avoir de grands espaces. C’est magique… Merci!
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Un choix des plus singuliers comme je les aime ! C’est aussi pour cette raison que j’apprécie autant ce RDV. Les propositions permettent de naviguer vers d’autres horizons littéraires. Merci pour cette chronique !
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Je suis alors contente d’avoir présenté cette figure tellement importante dans l’imaginaire collectif. Grey Owl a donné beaucoup de conférences aussi dans le monde pour parler de la Nature, des peuples autochtones, de la vie dans le Grand Nord. Il apparaît comme un écologiste avant-gardiste! Merci pour ton commentaire! 🙂
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Bonjour Nathalie. Je te remercie de m’avoir fait découvrir Grey Owl qui semble être un personnage important pour la défense de la nature au siècle dernier. Et il semble avoir été un écrivain très intéressant, j’aime beaucoup tous ces extraits ! Surtout celui sur la cécité blanche – saisissant ! Bonne journée à toi 🙂
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Bonjour Marie-Anne, la plume de Grey Owl est vraiment vivante. En tant que lectrice, j’ai vraiment ressenti son émotion lorsqu’il marchait, lorsqu’il décrivait son contact avec la nature. C’est plus que vivant! Merci à toi!
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Je ne connaissais pas Grey Owl ! Mais alors là tu m’as appâtée !!!
Peut-être, cependant, que je m’y essaierais plus avec un roman…
Son nom est noté dans mes « à découvrir » 2023 hihi !
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Je ne pense pas qu’il ait écrit un roman… Ce sont plutôt ses pensées sur la Nature, ses expériences avec les animaux, ses connaissances sur les peuples autochtones, etc. Il a fait publier d’autres livres alors tu pourras choisir celui qui capte ton attention. Merci!
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La dernière frontière ne me semble pas mal, même s’il est vrai que ce n’est pas un roman, ça tient tout de même un peu du récit !
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Oui! Alors bonne découverte avec notre Grey Owl! 🙂
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Merci !
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Ta chronique me touche particulièrement… j’ai eu l’occasion de passer deux mois en Ontario lorsque j’avais 16 ans. Avec la fille aînée de la famille dans laquelle je séjournais, qui avait un an de plus que moi, nous allions souvent dans une cabane abandonnée, dans les bois qui jouxtaient la maison. Beaucoup moins au nord, et beaucoup moins perdu que les espaces dans lesquels il a vécu, mais, à partir de cette cabane perdue, je peux me représenter l’importance de l’abri, et la cohabitation avec ces espèces sauvages. Quelle chance que ce témoin ait eu la capacité de transcrire en mots son précieux vécu, ses émotions et ses convictions. Merci de tout cœur pour ce beau partage.
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Je suis aussi touchée par ton commentaire. La cabane dans les bois fait partie de notre imaginaire collectif. Enfant, nous avions pour la plupart une cabane pour aller y jouer. Je suis bien contente si tu as pu goûter à une partie de notre essence lors de tes 16 ans. Grey Owl est un grand écologiste et un écrivain qui a témoigné d’une époque qu’il ne faut pas oublier. À bientôt! 🙂
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Très original, merci pour la découverte ! Voilà un titre qui doit faire voyager…
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Certainement! Merci d’être passé via mon article dans le Grand Nord canadien! Il est aussi magnifique! 🙂
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Je n’en doute pas, il fait complètement rêver !
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J’aime quand Les classiques c’est fantastique permet de découvrir des auteurs inconnus. C’est le cas, en ce qui me concerne, pour cet auteur canadien dont je note le nom dans mon carnet dédié à la littérature. Vous m’avez donné l’envie de le lire. Merci pour ce partage enthousiasmant.
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Je suis bien contente de l’apprendre. Le but de mon blogue est de partager mon amour de la littérature québécoise et ou canadienne. Merci beaucoup de noter cet auteur dans ton cahier!
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Ce titre a tout pour me plaire. Je te sens conquise.
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Oui. J’ai passé vraiment un agréable moment avec le plus célèbre de nos gardes-chasses. Merci! 🙂
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Le sujet m’intéresse. Je note…
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Bonne lecture!
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