Madame lit On est de son enfance de Robert Lalonde
Chère lectrice, Cher lecteur,
J’ai eu l’immense privilège de recevoir en service de presse On est de son enfance de Robert Lalonde publié aux Éditions Boréal en 2024. D’ailleurs, je remercie la maison d’édition pour cet envoi. Si vous me lisez depuis un certain temps, vous savez sans aucun doute que j’adore la plume de Robert Lalonde. Par exemple, sur ce blogue, j’ai rédigé des chroniques sur :
- La reconstruction du paradis
- Fais ta guerre, fais ta joie
- Le monde sur le flanc de la truite
- Un jardin entouré de murailles
Et j’ai relaté ma rencontre avec lui lors du Salon du livre de l’Outaouais. Vous pouvez lire cette chronique en cliquant sur Rencontre.
On est de son enfance
Dans ce carnet rédigé à North Hatley de février 2022 à septembre 2023, Robert Lalonde invite sa lectrice ou son lecteur à emprunter les chemins de traverse en compagnie, entre autres, de ses auteurs fétiches comme Giono, Dillard, Colette, etc. Sur un sentier, il regarde autour de lui la nature environnante et il cherche à reconnecter avec la profondeur de son âme. Pour ce faire, il aborde le thème de l’enfance. D’ailleurs, le titre de son carnet réfère à une phrase de Saint-Exupéry : « On est de son enfance comme on est d’un pays. » Ce pays de l’enfance est tantôt lumineux et parfois, il apparaît sombre. Comme il le mentionne : «C’est que l’enfance qui convoque la merveille charroie aussi le mal-être». (p. 194) L’auteur se souvient, oublie, se souvient, oublie… Sa quête est celle d’un chercheur d’or qui tente de percer l’immuabilité de ses émotions tributaires de l’enfance. Sur ce sentier, il pense aux siens, à ses disparus, aux leçons apprises et ce, même sur un lit de mort (celui de son grand-père). À cet égard, il est parfois mélancolique par rapport au temps. Par exemple, lorsqu’il repense à son ami Dominique, décédé aujourd’hui, à qui il doit, comme il le soulève, sa «révolution intranquille», son «réveil nécessaire», il remarque :
«On n’a jamais le temps de manifester notre reconnaissance aux anges comme aux démons providentiellement apparus sur notre chemin, camarades qui nous ont tiré de pièges plausiblement mortels, avant de s’évanouir comme des spectres dès qu’on a eu le dos tourné.» (p.113)
J’adore ce type de réflexion qui m’entraîne dans mes souvenirs pour en arriver à cette conclusion, un peu comme Lalonde, : «Que reste-t-il de nos beaux jours […]». ( p.60).
La faune et la flore
Lorsque nous lisons du Robert Lalonde, il faut s’attendre à plonger dans un univers marqué par la faune et la flore. Qu’il pense à son passé ou encore qu’il soit dans le moment présent de son écriture, l’auteur présente des éléments de la nature. Ainsi, en causant avec un bruant chanteur, il entend la voix de son grand-père décédé alors qu’il était un jeune garçon :
«Puis, comme dans un rêve qui se déchire, apparaît grand-père Léopold, appuyé au plus costaud des peupliers trembles, sa casquette de guingois, les bras croisés sur sa poitrine. Il secoue la tête comme il le faisait quand, étourdi, je refusais de voir ou d’écouter. Il dit :
- Les grands gestes heureux des arbres, les ombres flottantes dans l’eau vive, l’odeur soûlante de la sève de pin qui perle sur l’écorce comme une rosée… La commune de ton enfance, les aiguilles qui chantent la langue du coeur, celle de l’esprit…Je vois battre ton coeur à grands coups, ta chemise palpite… Jamais tu ne dois oublier qui tu es, si tu ne veux pas que le malheur fasse jaillir de toi le son creux du bâton contre l’arbre mort…»(p. 74).
La nature apparaît indissociable de la vie de Lalonde. Elle a forgé son identité, elle l’anime, elle est son référent en tout temps. Mais encore, alors que les forêts canadiennes brûlent, Lalonde pleure. Il apparaît habité par un chagrin relié à son impuissance devant le mode de vie des habitants de la Terre axé sur la surconsommation.
«Au nord les forêts flambent, au sud on navigue en canot dans les rues des villages, un peu partout des tornades sillonnent le territoire. Et, bien sûr, nous n’y sommes pour rien. » (p. 211)
Cette nature, c’est la beauté, c’est l’immensité, c’est sa maison. En ce sens, je me retrouve dans les dires de Lalonde, car je ne peux pas vivre sans mes animaux, sans regarder les chevreuils venant nous saluer, sans observer les dindons qui sautent sur notre galerie pour se nourrir, sans voir les canards et les outardes nageant dans notre baie en été. Les animaux vivent. Ils rendent notre monde meilleur. Alors, ne tuons pas la beauté du monde.
La littérature et l’écriture
Robert Lalonde est un grand lecteur. Pour lui, la littérature s’avère importante. Elle s’infiltre dans ses pensées, dans sa perception de la vie et dans ses émotions. Ainsi, dans ce carnet, Lalonde n’hésite pas à placer des citations de ses auteurs préférés afin peut-être d’appuyer ses réflexions et c’est beau. Cette façon de faire donne vie au carnet, elle agit comme un baume pour penser nos blessures. Elle s’avère reliée à l’écriture. Comme il le soulève :
«Je lis et relis souvent, en parallèle, du texte frais et du texte bien conservé. Ce matin, Véronique Côté – La Vie habitable, 2014 – et Gabrielle Roy – La Route d’Altamont, 1966. Soeurs jumelles éloignées l’une de l’autre, toutes deux, à cinquante ans d’écart, interrogent le mystère de la beauté, celui de la création. » (p.147)
En abordant ces autrices ou ces auteurs fétiches, Lalonde nous les fait découvrir avec un autre regard. J’ai envie maintenant de lire La Vie habitable car je ne connais pas ce bouquin, pas plus que son autrice. La littérature, c’est contagieux!
De plus, Lalonde traite de l’écriture dans ce carnet. Comment doit-on écrire? Combien de temps doit-on consacrer l’écriture? Qu’est-ce que l’inspiration? Quelle est la perception des écrivains de l’acte d’écrire? Autant de questions auxquelles tente de répondre, entre autres, Lalonde. «L’écriture a toujours été pour moi le lieu d’un seul instant». (p. 25). En plus, c’est son grand-père qui lui a permis de développer une force, une persévérance par rapport à l’écriture.
Ce carnet se veut surtout une réflexion sur l’écriture. Alors, il faut écrire, il faut se tromper, il faut lire, il faut prendre son temps… il faut…
Merci M. Lalonde pour ce merveilleux carnet. J’ai adoré vous lire, comme toujours. En marchant, je penserai à vous et à celui qui vous accompagne dans vos balades, le Chien.
Que pensez-vous de ce genre de carnet? Aimez-vous ce type de réflexions autour de la littérature, de l’écriture, de la vie de la part des autrices et des auteurs?
Bien à vous,
Madame lit
Robert Lalonde. Boréal. 2024. 227 p.
ISBN : 978-2-7646-2817-1
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L’aphorisme du grand-père me plaît beaucoup ! Pour le reste, je ne suis pas très attirée par ce type de récit, même si celui-ci a l’air très beau. Ou alors il faut le picorer ?
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Ce n’est pas un récit c’est plus un carnet, un journal où l’auteur aborde son enfance, ses observations de la nature, sa passion pour la littérature et l’écriture. Merci! 🙂
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Bonjour Nathalie, c’est une très belle chronique ! J’espère découvrir un jour cet auteur qui aime la nature et la belle littérature… Les références à Colette et Giono sont intéressantes. Je vais noter son nom.
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J’espère que tu pourras trouver un Carnet de Robert Lalonde. Ses connaissances littéraires sont riches et il sait comment les insérer dans ses pensées. Merci!
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Je ne connais pas du tout mais les thématique (et même la forme) pourrait me plaire.
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Si vous appréciez les carnets d’écrivain, ce bouquin est pour vous! Au plaisir et merci!
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Cette chronique me fait penser au livre d’Antoine Wauters que j’avais chroniqué il y a quelques mois, « Le plus court chemin », où il retournait également à son enfance, la nature, et la place de l’écriture dans sa vie… et en même temps, le style de Robert Lalonde me paraît bien différent. Est-ce un carnet positif à la fin ? On sent que tu l’as beaucoup aimé, mais j’ai le sentiment de ressentir de l’amertume, dans les mots de l’auteur. Une mauvaise interprétation de ces extraits que tu présentes? Merci en tout cas!
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Ce Carnet est plutôt réaliste par rapport à la nature, à la guerre, à la destruction. Mais, il y a de l’amour partout. Je crois que les carnets de Lalonde sont rédigés en pleine conscience pour nous montrer que la littérature peut nous aider à interpréter notre monde et à trouver une façon de survivre dans ce chaos. J’espère que ces précisions sont éclairantes… Merci!
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